Sur la condition humaine, l’éthique et l’éducation : conversation avec Edgar Morin

La conversation avec Edgar Morin a été realisé auprès de l’Université de Messine, faculté de philosophie pendant les journées internationales d’etude (summer school) 2006. Le dialogue fait le point sur la situation contemporaine et les labyrinthes de la condition humaine.

Antonio Torrenzano. Martin Heiddeger affirmait : “aujourd’hui nous savons plus choses sur l’humain”, mais…

Edgar Morin. Heidegger dit “aujourd’hui nous savons plus choses sur l’humain mais, en même temps, nous savons moins des choses sur l’humain”. Chaque acquisition est dispersée et pas organisée dans une vision cohérente. Toutes ceux qui travaillent à l’intérieur d’une pensée fragmentaire, ils ne se rendent pas du tout compte de leur totale incapacité à comprendre et penser la complexité.

Antonio Torrenzano. Donc il faut partir par une pensée complexe (mettre ensemble unité et multiplicité) pour examiner les rapports entre science et science sociales, entre science et philosophie, entre littérature et morale?

Edgar Morin. Le destin de l’humanité dépend de la manière de penser aussi à la réalité humaine. Le vieux concept d’humanisme affirmait que l’homme devait être le maître du monde et il devait conquérir le même. Cet humanisme n’a plus de sens, si nous voulons jouer à faire les démiurges, nous risquions de détruire la terre. Nous ne pouvons pas suivre un développement quantitatif accéléré. Mon humanisme est celui de la fragilité humaine, une condition existentielle qui nous rapproches et qu’il reconnaît à tous, sans distinction de race et de sexe, les mêmes droits.Si le nouveau siècle marche à devoir, nous devrons dépasser chaque vision fragmentaire.

A.T. Son défi est toujours celle de la complexité? La méthode qui dépasse la fragmentation des connaissances et qui reconstruit une pensée globale?

Edgar Morin. La vraie complexité est un défi pour l’esprit. Aujourd’hui l’homme biologique est étudié par la biologie, l’homme “pas biologique” par la psychologie ou par la sociologie ou l’économie. Nous avons perdu l’habitude à contextualiser, à globaliser. Si vous prenez la sociologie, par example, on doit toujours comparer les réflexions des interactions sociales humaines avec l’histoire, avec l’économie, la psychologie, la religion.

A.T.Comment les réseaux changent le partage des savoirs? Notre temps présent est plus une intelligence collective ou connective?

Edgar Morin. Pour moi, l’ordinateur représente un instrument d’autonomie et de progrès. Avant des ordinateurs, je faisais des manuscrits. Je les transcrivais par la machine à écrire, je les corrigeais manuellement, je les révisais. J’ai passé trois ans pour écrire le premier volume de la Méthode. Si j’avais eu un ordinateur, à ce temps, à la fin des ans soixante-dix, j’aurais employé, probablement, un an et demi. L’ordinateur me permet toutes les corrections et internet me donne encore plus:la possibilité d’une communication immédiate pour tous les renseignements que je cherche. Nous disons que toutes ces technologies doivent être racontées à l’éducation et à l’enseignement par exemple. Je suis très favorable à l’introduction de ces nouveaux instruments pour l’éducation. Mais, tout cela ne peut pas remplacer le rôle qui rehabille un professeur ou un maître cet à dire une responsabilité de relation individuelle avec les élèves ou avec les étudiants. Je souligne encore que tout cela ne peut pas remplacer ce que j’appele ironiquement “charisme” ou “passion” que le professeur peut transmettre aux étudiants. Les technologies dans ce sens donc sont complementaires. Les nouveaux médias permettent une communication immédiate. Dans les nouveaux médias, je retrouve l’ambivalence de toutes les techniques humaines que nous donnent une possibilité émancipatrice, plus d’autonomie. Notre temps est plutôt une intelligeance connective. Quelques auteurs, comme De Rosnay ou Levy, supposent que de toutes ces connexions il émerge un esprit collectif mais, il me semble, que nous sommes seulement dans un “état d’esprit connectif”.

Antonio Torrenzano. Un des champs de sa théorie est centré sur l’éducation. Dans cette évolution vers des changements fondamentaux dans nos styles de vie et nos comportements, l’éducation a un rôle prépondérant à jouer.L’éducation est la force du futur parce qu’elle est l’un des instruments les plus puissants pour réaliser le changement.L‘un des défis les plus difficiles à relever sera de modifier nos modes de pensée de façon de faire face à la complexité grandissante, à la rapidité des changements et à l’imprévisible, qui caractérisent notre monde. Nous devons repenser la façon d’organiser la connaissance. Pour cela, nous devons abattre les barrières traditionnelles entre les disciplines et concevoir comment relier ce qui a été jusqu’ici séparé. Comment gérer un défi ainsi difficile?

Edgar Morin. Mon travail sur la méthode a conséquences sur l’évaluation de l’enseignement où on oublie souvent le problème fondamental: la condition humaine. Beaucoup de choses que les enseignants devraient enseigner, ils ne les enseignent pas du tout. Il faut enseigner la connaissance de la connaissance, la condition planétaire de l’humanité, la même incertitude du destin humain. Et encore, l’incertitude de l’histoire: nous ne savons pas si notre demain sera le même ou le contraire du monde. Pour penser localement, il faut maîtriser la pensée globale, avoir la possession du contexte général.Seulement une pensée, qui unit et interconnecte,aide l’étudiant à comprendre. Les professeurs ne doivent plus ressembler à ces loups qu’ils marquent leur territoire avec l’urine et ils mordent ceux qui le violent. Ce qu’est plus redoutable pour eux, c’est le manque du concept de “eros” que comme Platon affirme: “il est au même temps désir, plaisir et amour, désir et plaisir de transmettre,amour pour la connaissance et amour pour les élèves.

Antonio Torrenzano. Est-ce que j’aimerais savoir comment vous jugez le rapport parmi les nouveaux médias et le procès éducatifs ?

Edgar Morin. Je suis pour l’intégration entre éducation, ordinateur ou Internet sans changer la structure fondamentale qui est celle de la relation personnelle entre professeurs et élèves. Je répète, le charisme et la passion de celui qui transmet les savoirs c’est important. Je ne pense pas qu’il y ait une révolution de la technique en relation aux procès formatifs. La révolution est la transmission du savoir, cet-à-dire la manière de véhiculer le contenu et la communication du même.

Antonio Torrenzano. Dans un autre entretien, vous avez affirmé qu’il n’y a pas de civilisation sans le droit et l’éthique sinon c’est la barbarie. Mais notre actuelle impuissance à distinguer temps de guerre et temps de paix ou, plus encore, fronts de guerre et lieux où vivre sûrs…c’est une triste realité. Est-ce que nous sommes vraiment dans une ère nouvelle?

Edgar Morin. Nous ne pouvons pas oublier ou ignorer de vivre dans un endroit très beau, que nous pourrions le rendre encore plus beau en trouvant un accord avec la nature au lieu de la détruire. La société civile et l’individu sont en train de chercher nouvelles socialités et, je pense qu’ils puissent trouver tout cela. Le vrai problème est savoir si l’humanité, dans son ensemble, sera apte à construire une nouvelle vie commune en avenir. Si, elle sera capable d’accepter le propre destin!

Antonio Torrenzano

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