Pour l’avenir… alerte faim! Conversation avec Daly Belgasmi, directeur du PAM de l’ONU, bureau de Genève.

daly_belgasmi_photo.1210961524.jpg

Conversation avec Daly Belgasmi, agronome, économiste, directeur du bureau Programme alimentaire mondial des Nations Unies à Genève. Le dialogue a eu lieu à Genève pendant un séminaire avec des étudiants italiens, le 20 mars 2008.

Antonio Torrenzano. La situation alimentaire dans le monde, elle n’est pas satisfaisante. Les agences techniques des Nations Unies ont recensé plus de 39 pays affectés par des crises alimentaires,dont 25 en Afrique, 11 en Asie et Proche-Orient, 2 en Amérique latine et 1 en Europe, la Tchétchénie.

Daly Belgasmi. Le monde est confronté au problème de la faim qui se présente aujourd’hui dans une manière énorme. L’augmentation des prix des céréales et du pétrole autant que de la baisse du dollar a changé le panorama économique. Jamais l’index des prix des céréales n’a été aussi élevé depuis sa création en 1845. Jamais les réserves alimentaires dans le monde n’ont été aussi basses : 53 jours de réserve aujourd’hui contre 169 jours en 2006. Nous sommes entrés dans une ère où il n’y a plus de surplus alimentaire. Nous avons à relever un défi comme n’en avons jamais connu. Dans le monde industrialisé, une famille dépense en moyenne 15% de ses revenus à l’achat de norriture.Dans les pays pauvres, ce pourcentage atteint parfois jusqu’à 75%. Or, si comme les économistes affirment, les prix des céréales augmentent encore de 20%, comment feront-ils les familles des pays du Sud de la planète ? Le spectre de la famine commencera alors à se dessiner. Pas étonnant dans ces conditions que des manifestations contre l’augmentation des prix des céréales aient éclaté au Burkina Faso, au Mexique,au Cameroun et ailleurs dans le monde. Aucun Pays en voie de développement ne peut être épargné.

Antonio Torrenzano. L’agriculture, dans sa configuration contemporaine et dans les cadres de politiques libérales, peut conduire à des raretés pénibles. En termes absolus, l’objectif du Millénaire de réduire de la moitié le nombre des individus affamés pourra-t-il être rempli ?

Daly Belgasmi. Nous sommes non seulement loin de pouvoir atteindre l’objectif du Millénaire de réduire la moitié du nombre des 852 millions de personnes affamées dans le monde d’ici 2015, mais nous risquons de perdre les acquis. En termes absolus et en raison de l’augmentation de la population mondiale, quatre millions de personnes de plus chaque année souffrent la faim. Les actions développées par le PAM et les autres agences techniques des Nations Unies, elles ont produit des progrès. Des pays, par exemple, comme la Chine et l’Indie ont tiré de la misère des millions des leurs citoyens. Le Ghana, le Chili, le Brésil et le Vietnam pourraient atteindre l’objectif du Millénaire. Le Programme alimentaire mondial, après l’augmentation de 40% de ses couts d’achats de vivres et de transport depuis le mois de juin 2007, il aura besoin au moins d’un demi-milliard de dollars de plus sur son budget prévu de 2,9 milliards de dollars pour maintenir l’assistance à 73 millions de personnes. Une évolution qui peut paraître impressionnante si l’on ne tient pas compte de la progression de la faim dans le monde. La fin de la guerre froide a entraîné de plus la multiplication des conflits. Sans parler du plus grand nombre de catastrophes naturelles.

Antonio Torrenzano.Dans ces conditions, il faudra sans doute plus de moyens que prévu pour résoudre les problèmes annoncés, notamment en Afrique. Il faudra exercer une pression mondiale plus forte pour mener une meilleure situation de vie dans ces régions et alerter la communauté internationale sur la nature et l’urgence des mesures à prendre.

Daly Belgasmi. Plusieurs facteurs expliquent le prix élevé des céréales:l’augmentation du prix du pétrole, les changements climatiques, la production des biocarburants, la croissance économique de la Chine et de l’Indie. Il est donc urgent que les pays industrialisés revitalisent leur aide au développement agricole qui n’a pas bougé depuis 1984 et que les pays africains qui se sont engagés à utiliser 10% de leur budget national pour le développement agricole le fassent sans tarder. Car il s’agit du défi plus important à relever pour la paix et la sécurité dans le monde. L’heure est grave et le Programme alimentaire mondial ne sonne pas l’alarme sans raison. Le temps est une donnée cruciale de l’action humaine, surtout dans la relation de l’homme avec la nature.

Antonio Torrenzano

 

Join the discussion

Il tuo indirizzo email non sarà pubblicato. I campi obbligatori sono contrassegnati *