Mes étudiants, l’école, apprendre: les passions d’une vie.

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Il est difficile de prendre la distance du propre métier quand il se l’aime grandement. J’ai aimé et j’aime largement ce que je fais. Et, j’ai toujours pensé qu’il y était seulement une manière pour le faire: lui serrer à moi, tout entièrement.

L’antinomie entre avoir et ne pas avoir une âme dans le propre métier, entre posséder et ne pas posséder une philosophie qui peut guider l’action, c’est le résultat du vivre contemporain. Je n’ai jamais supporté les énonciations, mais les réflexions de mes étudiants et la pratique du doute, ils ont été toujours la manière la plus sûre pour comprendre et interpréter notre présent. Pour moi, l’école, l’enseignement, mes étudiants et étudiantes ont été les points de repère d’une vie.

Sans un investissement émotif, sans la conscience de servir à quelque chose, au-delà de la routine du métier, il n’y aurait pas été beaucoup de possibilités d’évasion par rapport à une situation plate, dépourvue de perspectives réelles.

Notre temps, il est le lieu privilégié des tièdes. De tous ceux qui ont tendance à un risque zéro. Mais, il n’existe pas d’espoir de futur pour nos sociétés ne s’y en misant pas de nouveau sur les passions. Et avec mes étudiants, j’ai toujours vécu de tout ça. Nous vivons dans un temps qu’on n’aime pas les émotions abondantes; sans grandes illusions, nous avons appris à anticiper les désappointements. Cette époque de compromis journalier est-elle devenue plutôt l’endroit de passions glacées, de passions sous-accrues qui subissent le désenchantement d’une chute presque générale de valeurs collectives .

La tiédeur qui nous entoure, elle tente de se libérer de chaque point obscur trop compromettant. Le monde des passions, de celles civiles en particulier, c’est un univers démodé. Cette perte, elle a permis de tomber dans un quotidien médiocre; de réévaluer un temps présent, quand dans d’autres temps, ce consentement il aurait été accusé de mollesse.

La passion, en revanche, est un sentiment puissant. La passion est une inclination personnelle qui nous fait assumer droits et torts comme une raison vitale de notre manière d’être. Un excès d’ardeur, certaines fois pas demandée de manière exprès par les autres, qui accentue les tons. Mais…, ce sont les tons qui font la musique. L’éducation va bien au-delà de l’excellence intellectuelle donnée à nos garçons et jeunes filles dans nos collèges, nos lycées, nos universités, dans nos instituts de formation. Il s’agit de former la Personne dans sa dimension humaine totale en l’accompagnant durant toutes les étapes de la vie. Éduquer, faire apprendre et apprendre, c’est accompagner sans relâche autrui vers la découverte de lui-même; c’est en même temps apprendre constamment avec autrui à se percevoir et à se recevoir comme un don reçu et donné; c’est le fondement de l’esprit de partage et de coopération.

Aujourd’hui, les vertus que mes étudiants vont cherchant, ils semblent vraiment se concilier avec une nouvelle envie de faire, de s’assumer de nouvelles responsabilités civiles, le courage d’entreprendre. Je trouve, encore, dans mon groupe de garçons et jeunes filles de 17 et 18 ans, la curiosité pour le nouveau qui avance (apparemment lointain) par une logique sensible et multiple. Quand, je dialogue avec eux, une pensée riche émerge de manière articulée, émotionnelle, empathique, mais encore paradoxale pour le monde des adultes. Une pensée qui ne sépare pas les différences, une pensée passionnée, à la fois dure et affectueuse, une pensée jamais plate pour analyser les crises, recueillir les affinités, proposer de nouvelles solutions. Ce sont les adultes, dans plusieurs occasions, à ne pas vouloir écouter cette vision nouvelle qui avance. J’ai vécu mes rapports et mes relations avec mes étudiants et étudiantes toujours dans cette manière. Oh pour mieux dire, sont-ils qui m’ont fait vivre ma vie dans cette manière. De tout ça, je remercie mes élèves pour m’avoir fait rester vif. Pour m’avoir fait rester très vif comme Jankelevitch affirme dans son Traité de vertus: avec élan aventureux, à la chasse de nouvelles curiosités, amour pour la vie. Toujours avec le danger qui me ronge, le coeur qui bat, le parfum printanier d’aventure.

La question fondamentale que se pose aujourd’hui est alors la suivante:comment faire émerger, accepter, respecter et promouvoir ces valeurs humaines, non en opposition, ni même en juxtaposition, mais en corrélation avec les indicateurs économiques de rationalité maximale, de croissance optimale ?

Antonio Torrenzano

 

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