Réchauffement climatique, pillage de la nature, nos labyrinthes contemporains. Conversation avec Vandana Shiva, Fondation pour la science et les ressources naturelles.

vandana_shiva_seminaire_de_sanrossore_image.1259944822.jpg

Conversation avec Vandana Shiva, physicienne, épistémologue, écologiste, écrivain, docteur en philosophie des sciences. Vandana Shiva dirige la Fondation de recherche pour la science, les technologies et les ressources naturelles (Research Foundation for Science, Technology and Natural Resource Policy) et elle est à présent un point de repère dans la défense de l’agriculture paysanne et biologique face à la politique d’expansion sans limites des multinationales agroalimentaires. Dans les années 1980, elle a été une activiste du Mouvement sauvons le Narmada qui s’ est opposé à la construction d’énormes barrages sur la rivière Narmadâ, barrages bouleversant les écosystèmes et obligeant aux déplacements de millions de paysans. Vandana Shiva est aussi engagée dans l’association «Navdanya», association pour la conservation de la biodiversité et la protection des droits des fermiers. La ferme de Navdanya est une banque de semences, qui a permis à plus de 10 000 fermiers d’Inde, du Pakistan, du Tibet, du Népal et du Bangladesh de redécouvrir l’agriculture organique comme on le dit en Inde : principe entre l’agriculture paysanne et l’agriculture biologique. Autrice de nombreux essais, édités dans plusieurs langues diplomatiques, dont «La guerre de l’eau. Privatisation, pollution et profit» 2008; «Le terrorisme alimentaire. Comment les multinationales affament-t-elles le Tiers-monde» avec Marcel Blanc, 2001; «La biopiraterie ou le pillage de la nature et de la connaissance», 2003. Le dialogue a eu lieu dans plusieurs villes italiennes : à Pise pendant la réunion internationale de San Rossore au mois de juillet 2009, à Turin pendant le festival international sur la spiritualité.

Antonio Torrenzano. Un autre modèle dans cette brume de l’avenir est-il possible à Copenhague ?

Vandana Shiva. Les nombreuses crises de l’environnement qui tourmentent notre planète dérivent d’un désaveu du rôle des ressources naturelles. Pour résoudre ces crises, il est nécessaire que les communautés locales récupèrent la surveillance des ressources naturelles afin de construire une vraie économie soutenable. À Copenhague, il faudrait joindre à un accord international pour réduire les émissions de 90% d’ici au 2030. Les engagements pris jusqu’à maintenant par la communauté internationale ils ne me semblent pas suffisants. Il faudra encore construire une nouvelle attitude pour affronter cette urgence qui dérive de nombreux facteurs.Nous avons besoin d’une nouvelle vision holistique des savoirs, la connaissance fragmentée et mécaniste par laquelle le monde a géré ces dernières vingt années elle n’est plus suffisante. Les problèmes inhérents au milieu de l’environnement, à la pauvreté ils doivent devenir prioritaire respect à la croissance économique libériste. Le réseau paysan Navdanya, que je coordonne, il se propose comme une solution de remplacement aux petits paysans indiens menacés par les multinationales du secteur agroalimentaire. Navdanya signifie dans ma langue «neuf graines», un nom qui évoque la richesse de la diversité et le devoir de la défendre devant l’invasion des biotechnologies et des monocultures de l’agriculture industrielle. Les biotechnologies réduisent la diversité des formes de vie au rôle de matières premières pour l’industrie et les profits. Les graines génétiquement modifiées piègent les petits agriculteurs dans une cage de dettes et de mensonges. Les graines, ils sont rendus inféconds de manière telle qui ne peut plus se reproduire et ils doivent être achetés tous les ans à un prix très cher par les paysans.

Antonio Torrenzano. La Terre souffre, notre mère gronde. Elle rougira, demain, de colère. Pour les populations autochtones, le réchauffement climatique sera un renversement radical de situation, un choc. Quant à nous, les conséquences sont imprévisibles. L’occident, malgré le désastre de la crise économique et financière, il continue à chercher de possibles solutions dans une croissance économique effrénée et dans le profit. Quand on parle d’écologie, de protection de l’environnement, mais dit un jour Jean Malaurie, ce sont des considérations qui, avec le temps, deviennent des idées paresseuses. On en parle, elles agitent les esprits et puis l’été passe, Noël arrive et on les oublie.

Vandana Shiva. Le modèle économique libériste de la mondialisation a été jusqu’à présent un modèle où le pouvoir absolu des multinationales a dominé la vie de millions d’individus, surtout des pauvres. Un modèle qui n’a pas tout à fait aimé la planète. Ce modèle est totalement différent de mon idée de démocratie. Cette culture de l’exploitation effrénée des ressources naturelles n’a jamais aimé la planète et la même a produit de conflits innombrables. Dans le social, ce modèle a produit une culture de l’exclusion, une culture du refus de l’autre en préférant de rapports sociaux fondés simplement sur les échanges économiques et sur le profit. Ce modèle de développement a nié les plus élémentaires droits humains et il a mis de côté une grande partie de l’humanité. Mon idée de démocratie ? Un système qu’il a du respect pour la biodiversité, la justice sociale et pour une croissance économique soutenable. Le système libériste a saturé déjà toutes les ressources naturelles disponibles et cette saturation est à l’origine de tensions de plus en plus fortes.

Antonio Torrenzano. Est-ce que vous pouvez nous faire des exemples ?

Vandana Shiva. La croissance économique de la Nation indienne, mon Pays, dont on discute sur tous les journaux du monde cache un très haut pourcentage d’expropriations de terre soustraite aux petits paysans et aux plus démunis. Cette terre est achetée à des prix dérisoires des grandes multinationales qui produisent successivement à des prix déchirés. La situation est en train de causer de massives migrations vers les villes où nombreux individus, sans plus de la terre à cultiver ni du travail, ils n’augmentent que le nombre de désespérés qu’ils envahissent déjà les banlieues de mon pays. Dans une brève période, d’ici à cinq ans, cette situation produira de possibles conflits et inattendues situations d’instabilité. Parallèlement, le développement de l’agriculture industrielle, basée sur une massive utilisation de pesticides chimiques ou sur l’imposition des semences modifiées génétiquement, il a été cause de la faillite des petits agriculteurs incapables de soutenir ces coûts et la concurrence des multinationales. En 2004, dans mon pays nous avons eu plus de 16.000 paysans qui se sont suicidés. Les suicides dérivent de l’endettement provoqué par l’augmentation des coûts de production et de l’effondrement des prix des produits agricoles. Les suicides sont les effroyables résultats d’une politique agricole qui protège les intérêts du capitalisme mondial et qui ignore ceux des petits agriculteurs.

Antonio Torrenzano

 

 

Join the discussion

Il tuo indirizzo email non sarà pubblicato. I campi obbligatori sono contrassegnati *