Crise économique : peut-on regarder l’avenir au-delà d’un PIB ? Conversation avec Rasmata Kabre, économiste.

Conversation avec Rasmata Kabre, économiste, coordonnatrice de la fondation pour la promotion des droits des femmes au Burkina-Faso, vice-présidente de l’association de BPW (Business and professional women) dans la capitale Ouagadougou. La conversation avec Rasmata Kabre a eu lieu à Rimini pendant la 42e édition des journées internationales d’étude de la Fondation Pio Manzù (http://www.piomanzu.org) en cours à Rimini du 21/23 octobre 2011 sur le génie féminin.

Antonio Torrenzano. L’échec des marchés dans le secteur financier a eu d’importantes externalités sur la production et l’emploi, mais aussi sur les interdépendances nord-sud de la planète. Après trois ans de crise économique, de tensions accrues et d’une constante détérioration de l’économie mondiale, l’avenir de la communauté internationale reste incertain. Est-il possible de repenser l’argent et le profit dans une manière différente au sens normal du mot ?

Rasmata Kabre. La valeur monétaire n’est qu’une partie de nos valeurs. Il est important de ne pas tout réduire à une dimension économique. La crise actuelle reflète des problèmes qui dépassent la conduite de la politique monétaire. Les femmes africaines ont une façon bien à elles d’exercer leur ascendant, façon du tout différente des hommes. Les femmes sont détentrices de savoirs cruciaux qui peuvent produire le changement social. Des savoirs cruciaux pour regarder au-delà d’un PIB ou de la simple dimension économique. Les capacités féminines doivent être des moteurs de changement social et politique encouragés pour le bien de tous.

Antonio Torrenzano. Votre engagement au Burkina Faso est ancien. Depuis le 2006, vous avez créé à Ouagadougou une association pour aider les femmes avec graves problèmes de santé. Femmes qu’une fois malades, elles viennent refusées par leurs maris et par leur famille d’origine. Comment a-t-il été le déclic de votre engagement ?

Rasmata Kabre. La pauvreté dans mon Pays fait vivre presque le 44% de la population dans une situation de misère. Dans ce pourcentage, les femmes sont les victimes majeures, les victimes silencieuses. La situation de la pauvreté extrême au Burkina Faso, c’est une blessure ouverte. Les femmes de mon Pays souffrent de manière disproportionnée cette condition. Condition aussi aggravée par l’inégalité entre le sexe. Un des problèmes prioritaires qui nous concernent est aussi la mortalité maternelle. Sur ce sujet, nous sommes loin d’avoir progressé suffisamment. L’association a pris en main la défense de toutes les femmes exclues du tissu social et économique de mon Pays.Toutefois, l’association se bat pour la réalisation de tous les objectifs du millenaire convenus au plan international, mais aussi pour l’égalité des genres retenue vitale pour la lutte contre la pauvreté extrême et le droit à la santé de toutes les femmes au Burkina Faso.

Antonio Torrenzano. Nous vivons, dans cette période historique, un décalage entre une mondialisation réductrice, financière et spéculative et la recherche d’une véritable mondialité. Comment et dans quelle manière le «Génie féminin» pourra-t-il être le moteur du changement social et politique?

Rasmata Kabre. Les femmes adoptent un style différent. Les femmes discutent, les hommes monologuent. Dans une perspective historique, des progrès immenses ont été accomplis. L’important, c’est avoir un nombre toujours plus croissant de femmes qui entrent en politique pour apporter leur vision d’un avenir conjuguée chaque jour. Partout dans le continent africain, les femmes construisent de nouveaux ponts pour l’avenir. Elles défendent les droits des personnes et des communautés victimes d’oppression et de discrimination. La plupart de femmes connaissent très bien les risques qu’elles courent et les difficultés du quotidien. Après tous les conflits armés dans mon continent, les femmes ont été toujours les piliers de la réconciliation même si pendant la guerre elles étaient restées victimes des mauvais traitements et de violences.

Antonio Torrenzano

*Un remerciement particulier au photoreporter Riccardo Gallini pour l’image de Rasmata Kabre.

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