Par le moment extraordinaire du jubilé, le pape François renouvelle le souffle du concile Vatican II.

fiat_lux_image_rome_08-12-2015_imageDans son homélie de mardi 8 décembre, au cours de la célébration inaugurale du Jubilé extraordinaire, le Pape François a insisté sur la contemporanéité du concile Vatican II qui s’est achevé il y a tout juste cinquante ans, le 8 décembre 1965. Ce concile, a-t-il dit, a été une véritable rencontre avec les hommes de notre temps, d’une église poussée par l’Esprit saint à sortir des obstacles qui l’avaient refermée sur elle-même. Le concile Vatican II, le XXIᵉ de l’Histoire de l’église, a été l’un des événements marquants du XXᵉ siècle.

De 1962 à 1965, les pères conciliaires ont adopté seize textes. Sources de la foi, liturgie, liberté religieuse, la place de l’Église avec les autres religions. Une véritable mise à jour de la doctrine de la Foi qui a été lancée par le concile Vatican II. Au terme de trois ans de travaux, en présence de 2300 évêques réunis près de la basilique Saint-Pierre, le Vatican II produisit seize textes. Parmi les plus célèbres “Nostra aetate” sur les relations de l’Église avec les religions non chrétiennes, “Dignitatis humanae” sur la liberté religieuse, “Gaudium et Spes” sur l’église dans le monde de ce temps et “Dei Verbum” sur la révélation divine. Dans la mémoire populaire, on retient les changements dans la liturgie avec l’abandon presque général du latin, le dialogue avec le judaïsme et l’ouverture au monde. Maïs, qu’est-ce qu’est un concile ? Le concile est un processus spirituel par lequel les décisions proposées sont après accueillies et assimilées dans la vie d’une église locale et deviennent pour celle-ci une vivante expression de la foi apostolique. L’enseignement conciliaire s’opère dans le temps et dans l’espace, c’est-à-dire dans la durée et sur un terrain. Ensuite, ces textes connaissent différents niveaux de réalisation. Ceux-ci s’échelonnent depuis les efforts mis en œuvre par les pasteurs pour faire connaître les décisions conciliaires à l’ensemble de l’Église jusqu’au changement effectif des mentalités, ultime étape de la réception. Cette dernière tend à se manifester par des pratiques renouvelées en profondeur.

Les 16 textes du concile Vatican II sont composés de 4 constitutions, 9 décrets et 3 déclarations. L’histoire nous apprend que l’inscription d’un concile dans une église locale se réalise sur une période généralement assez longue. Ainsi, il a fallu des décades, voire des siècles, avant que les enseignements conciliaires soient reçus spirituellement et intellectuellement. Un processus donc complexe qui se laisse difficilement prévoir. En ce sens, le théologien J’Coman déclare : « Le processus par lequel les conciles sont reçus, ils sont des processus spontanés […] sans qu’aucune forme organisée ou qu’aucune procédure légale ne soit fournie. […] La réception des conciles oecuméniques est un processus historique complexe, composé d’éléments qui ne sont pas toujours identiques et difficilement distinguables […]. La forme des éléments varie selon les phénomènes historiques et psychologiques eux-mêmes » (1). Le pape émérite Joseph Ratzinger a distingué trois périodes dans le processus de réception du Vatican II : une phase euphorique jusqu’en 1968, une phase de désillusion (1970-1980) et, enfin, un moment de synthèse et d’équilibre, années 1980.(2)

Le Concile Vatican II voulait répondre aux questions que se posent les hommes dans les mutations du monde présent. Au moment de la convocation officielle du Concile, Jean XXIII avait fait allusion aux signes des temps. Et Paul VI s’est inséré dans ce mouvement de confiance et de sympathie pour l’homme et le monde. L’Église n’est pas en face de la société ; elle est dans le monde auquel elle est envoyée. Intimement solidaires du genre humain, les chrétiens doivent donc chercher la vérité et la solution juste de tant de problèmes moraux que soulèvent aussi bien la vie privée que la vie sociale. Le concile Vatican II devait réconcilier l’Église et le monde.

Qu’en est-il cinquante ans après son ouverture ? En 1966, le théologien Baraùna soulignait : «la constitution Lumen Gentium n’est qu’une nouvelle base de lancement et de projection pour l’avenir. Elle infuse un sang nouveau dans les veines de la communauté catholique et chrétienne. Il faut maintenant que ce sang pénètre et fasse partie de sa circulation vitale, vienne renouveler ses fibres et ses tissus jusqu’à la dernière cellule. Le ferment a été déposé dans la masse. Mais le processus de fermentation est à peine commencé». Une aventure donc qui n’en est qu’à ses débuts.

Antonio Torrenzano

Notes.
(1) J.Coman,« The Doctrinal Définition of de Council of Chalcedon and its Réception in the Orthodox Church of the East », The Ecuménical Review 22, 1970, p.35-36.
(2) J.Ratzinger, «Les Principes de la théologie catholique», Paris, Téqui, 1982, p.428-438.
(3) G.Baraùna, « L’Église de Vatican II », Paris, Cerf, coll. Unam Sanctam, Tome II, 1966, préface, p.23. À lire également G. Routhier, « La réception d’un concile », Paris, Cerf, coll. Cogitatio Fidei, 1993.

* La photo est tirée par le spectacle «Fiat Lux :éclairer notre maison commune», une projection sur la façade de la basilique Saint-Pierre de photographies sur la nature, signées entre autres de Sebastiao Salgado ou de Yann-Arthus Bertrand qui s’est déroulé mardi 8 décembre 2015. Organisé avec la Banque mondiale, ce spectacle d’images a fait à la fois écho à l’encyclique du pape François sur l’écologie et le déroulement à Paris au même moment de la COP21.