Mogadiscio est une ville totalement abandonnée, il m’a communiqué un ancien ami somalien. La population est laissée aux mains des miliciens et dans la plupart des quartiers de ville il y a seulement misère et dévastation. Mogadiscio reste un champ de guerre. Le point le plus meurtrier du pays. Malgré la capitale reste l’épicentre de guerre, Mogadiscio est en train de connaitre un nouveau et infernal phénomène : nombreux d’individus vont chercher du travail journalier dans la zone urbaine, même si elle reste la plus dangereuse. Aux violences armées, il s’ajoute la sécheresse que comme le poison d’un crotale il est en train de dévorer lentement tout le monde qui ne peut pas fuir. Les insurgés islamistes shebab dominent encore presque la moitié de la capitale, malgré les territoires conquis par la force de l’Union africaine.
Pour cette région agro-pastorale et nomade, c’est une catastrophe qui s’ajoute à toutes celles d’une capitale sans État. Plongée dans une guerre civile quasi incessante depuis la chute du régime du président Mohamed Siad Barre en 1991, Mogadiscio a sombré dans le chaos. Un gouvernement de transition a pu être formé en 2004, mais il est encore aujourd’hui loin et en mesure de fonctionner. Cette situation a presque détruit 80% des infrastructures. Dans la capitale, par exemple, trois individus sur quatre n’ont pas accès à l’eau potable. En total, presque 67% de la population de la ville vit sans approche à ce bien fondamental. Les élites ont fui le Pays et depuis vingt ans aucun docteur ni infirmière n’a été formé. Alors Mogadiscio, terre damnée ? Dans les circonstances actuelles, tout cela y ressemble fort.
La situation devient encore plus grave pour les familles nomades. La question nomade est la question fondamentale; le problème de base d’où découlent tous les autres. De la manière dont cette question sera traitée dans son ensemble, en tant que totalité sociale, économique et culturelle dépendra directement « le possible avenir » de la nation somalienne. À aujourd’hui, ces familles ont dû progressivement s’adapter à cette nouvelle réalité pour survivre. Très dépendantes de leur bétail, elles ont eu du mal à préserver leurs bêtes et elles ont été obligées à se sédentariser pour cultiver la terre. Mais travailler le terrain dans ce Pays aride est très difficile, surtout quand cela n’a jamais été leur métier. Où se réfugier alors ? Fuir est la réponse, peu importe la destination. Rien ne peut les arrêter… parce que l’enfer qui se passe aujourd’hui chez eux, c’est partout ailleurs le paradis.
Antonio Torrenzano