Où est passée la lenteur ? Conversation avec Domenico De Masi, université de Rome-La Sapienza.

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Conversation avec Domenico De Masi, sociologue, professeur de sociologie du travail à l’université de Rome-la Sapienza, auteur de nombreux essais traduits en plusieurs langues étrangères, il dirige auprès de la maison d’édition Franco Angeli de Milan des recherches et études sur le marché du travail. Le dialogue avec le sociologue a eu lieu à Naples.

Antonio Torrenzano.Pourquoi, selon vous, sans lenteur l’imagination il s’éteint?

Domenico De Masi. Sans lenteur l’imagination il s’éteint et le bien-être se dissipe. La qualité de la vie est entrée en collision dans la vie privée et dans le travail de tout le monde à cause de la vitesse. Le bonheur, affirmait Wolfgang Amadeus Mozart, est seulement l’imagination. Bien que l’homme soit un des animaux plus lents de toute la création, la gaucherie de son corps a été toujours rémunérée par la vitesse de son imagination. Mais ici, il bondit le paradoxe : nous réussissons à être assouvis avec l’imagination seulement si elle est alimentée à travers la réflexion et le calme. Pour avoir une douce vie il faut imaginer, pour imaginer il sert de réfléchir, pour réfléchir il faut se donner le faste de la pause, c’est-à-dire d’aller doucement. L’imagination est une voiture rapide qui, pour courir, a besoin de l’étrange carburant que c’est la lenteur.

Antonio Torrenzano. Une ressource précieuse la lenteur ! Mais depuis de siècles, l’homme a préféré la considérer comme un handicap autant que la faim, la misère, la maladie, la solitude.

Domenico De Masi. L’homme contemporain, pour mieux dire la société industrielle, il s’est concentré sur la vitesse et sur la technologie en réalisant un progrès sans précédent. Pour se déplacer plus vite avec les voitures, pour produire de plus en plus plus rapidement, pour prendre dans deux minutes un repas chez McDonald’s, pour fixer plusieurs rendez-vous dans la même journée jusqu’à vivre dans la continue anxiété d’arriver en retard. On peut dire, comme l’écrivain italien Ennio Flaiano affirmait, que dans des heures de pointe il est devenu impossible aussi l’adultère. Aussi le monde des enfants a pris les mêmes rythmes infernaux des adultes. Les petits, ils sont soumis désormais à une girandole précoce d’engagements minutieux : après l’école la piscine, l’activité sportive, le cinéma, la danse et tous les cours les plus absurdes. La quantité finit pour prévaloir sur la qualité, la pratique sur l’esthétique, la vie collective sur la privée, la rationalité sur l’émotivité.

Antonio Torrenzano. Le bon vivre est-il entré en collision avec la frénésie de la vie présente? Où est passée la lenteur ?

Domenico De Masi. Dans la société post-industrielle, les biens économiques sont produits désormais mécaniquement et à l’individu , il appartient de réaliser surtout des idées. La créativité a enfin sauté à la première place et l’exigence de réfléchir avec lenteur est devenue presque une obligation. Pour la première fois dans l’évolution historique de l’humanité, la vitesse du corps est accrue par internet ou par tous les moyens de transport, celle de l’esprit est freinée par le besoin de réflexion. Sans lenteur, l’imagination il s’éteint et l’homme devra expérimenter ce nouvel équilibre.

Antonio Torrenzano

 

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