Conversation avec Sir Ralph Dahrendorf, économiste, sociologue britannique et homme politique allemand. En 1957 il commence sa carrière d’enseignant à l’Université de Hambourg; en 1960 à l’Université de Tubinga; en 1966 à l’Université de Constance où il enseignera jusqu’en 1969. Son travail permet la réalisation de nombreux apports à la création de la Communauté européenne. Il est l’auteur d’importants travaux sur les classes sociales et les conflits de classes dans la société industrielle (1973) où il analyse les problèmes de la société poste capitaliste. Du 1974 au 1984, il est le directeur de la London School of Economics. Du 1987 au 1997, Sir Ralph Dahrendorf est le doyen du St. Anthony’s College à l’Université d’Oxford. En 2007, il reçoit le Prix Prince des Asturies en Sciences sociales. Considéré comme l’un des auteurs fondateurs de la «Théorie du Conflit social», il est auteur de nombreux essais dans plusieurs langues diplomatiques dont «Class and Class Conflict in Industrial Society», Stanford, Stanford university press, 1959; «Society and Democracy in Germany», New York & London, Norton & Company, 1967; «The Modern Social Conflict», University of California press, Berkeley and Los Angeles, 1988; «Reflections on the Revolution in Europe», New York, Random House, 1990. La conversation a eu lieu dans les villes de Trento,Santa Margherita Ligure et dans la ville de Cologne.
Antonio Torrenzano. Le sommet de Londres a été un nouveau Bretton Woods?
Ralph Dahrendorf. Dans cette phase désordonnée, la situation est différente. Il n’y a pas de vainqueur et les États-Unis ne sortiront pas tout seuls de la crise économique et financière. Ils n’ont pas la force financière nécessaire :l’endettement américain est déjà très élève. En 1944, à Bretton Woods, John Maynard Keynes s’était déjà aperçu que le monde, il allait vivre une nouvelle situation géopolitique et du nouveau rôle dominant du dollar et des États-Unis. La crise contemporaine est mondiale et il faudra trouver de solutions mondiales en mettant de côté tous les possibles intérêts nationaux. Donc, une situation historique différente.
Antonio Torrenzano. Est-ce que vous êtes sceptique sur les décisions que les chefs d’État et de gouvernement des principales économies mondiales ont prises à Londres?
Ralph Dahrendorf. Les chefs d’État ont produit des déclarations sur les nouvelles règles à écrire pour le système. Le Fonds monétaire international sera renforcé et il y a une première affirmation sur les paradis fiscaux. Rien de vraiment important. Je prévois que la reprise économique sera longue et lente. La communauté internationale reviendra en matière économique à la période historique de Ronald Reagan et de Margaret Tahatcher avec un 20% en moins de richesse et pour certains aspects à un style de vie qu’il ressemblera aux années soixante. Styles de vie des années soixante avec une profonde dichotomie: le monde aura beaucoup plus de technologie, mais sans la confiance de ces années. En voulant être plus optimistes, nous pouvons prévoir que la crise portera à un changement d’habitudes économiques et sociales, avec plus attention à l’économie réelle et à un éloignement de la culture de l’excès du risque sans risque dans le système financier. L’usage des cartes de crédit diminuera et tout cela sera, peut-être, une situation nouvelle.
Antonio Torrenzano. Une longue crise économique pourrait-elle provoquer de nouveaux conflits sociaux ?
Ralph Dahrendorf. Dans la société occidentale, j’observe une colère diffuse. L’envie de trouver des coupables. Ces protestations, pour le moment, ils sont individuels ou ils se développent en manifestations de masse traditionnelle. L’Europe dans ce siècle, sera-t-elle elle à la guide du monde ?
Antonio Torrenzano
*Dans l’image Ralph Dahrendorf auprès de l’université Helmut Schimdt pendant un séminaire avec des étudiants.