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La nuit de vendredi à samedi 19 décembre, elle sera certainement la nuit la plus longue et la plus compliquée pour les chefs d’État et de gouvernement de 119 pays réunis depuis jeudi 17 décembre à Copenhague. Ils représentent 82 % de la population mondiale et 86 % des émissions de gaz à effet de serre de la planète.

Le texte devrait prévoir les suivants points : 1) l’objectif de ne pas dépasser une augmentation de la température moyenne mondiale de 2°C avec les implications que cela suppose en matière de rejet d’anhydride carbonique; 2) une ligne de financements pour aider les pays les plus vulnérables dans la longue période; 3) un principe juridique de vérification avec le but de surveiller l’ambition écologique et les engagements financiers. Si ce principe était approuvé, il pourrait constituer l’embryon d’une nouvelle agence technique chargée de veiller à cette transparence. Enfin, le renvoi dans six mois à la discussion des textes plus détaillés, négociés depuis deux ans, qui devront être transformés en traité.

Deux scénarios sont alors possibles: un accord politique du meilleur compromis, c’est-à-dire les 193 États membres de la conférence de l’ONU sur les changements climatiques signent un texte qui n’aura rien de contraignant juridiquement à respecter pour ce qui concerne leurs engagements de réduction d’émissions de gaz à effets de serre. Ou une simple déclaration politique sur le modèle des déclarations d’intention qui caractérisent les sommets du G8 ou du G20 où ils affirmeront l’objectif d’une réduction d’émissions de 50 % en 2050 et des responsabilités différenciées en termes de droit et de pics d’émissions.

Antonio Torrenzano

 

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Conversation avec Isabelle Stengers, écrivaine, chimiste, philosophe, professeur en philosophie des sciences à l’Université libre de Bruxelles. Fille de l’historien Jean Stengers, la philosophe est connue pour son premier ouvrage, «La Nouvelle Alliance» (1979), coécrite avec le Prix Nobel de chimie Ilya Prigogine. Elle s’est ensuite intéressée, en faisant appel entre autres aux théories de Michel Foucault et de Gilles Deleuze, à la critique de la prétention autoritaire de la science moderne. En 1990, elle a fondé avec Philippe Pignarre la maison d’édition Les Empêcheurs de penser en rond. Autrice de nombreux essais, publiés dans plusieurs langues étrangères, dont «La volonté de faire science. À propos de la psychanalyse», Paris, édition Les Empêcheurs de penser en rond, 1992; «L’invention des sciences modernes», Paris, édition La Découverte, 1993; «Sciences et pouvoirs. Faut-il en avoir peur? » Bruxelles, Labor, 1997 (réédition La Découverte); «La guerre des sciences aura-t-elle lieu? », Paris, édition Les Empêcheurs de penser en rond, 2001; «Au temps des catastrophes. Résister à la barbarie qui vient», Paris, La Découverte, 2008. Isabelle Stengers est autrice aussi de nombreux ouvrages en collaboration dont avec Ilya Prigogine,« La Nouvelle alliance. Métamorphose de la science», Paris, édition Gallimard, 1979; avec Léon Chertok, «Le cœur et la raison. L’hypnose en question de Lavoisier à Lacan», Paris, Payot, 1989 et «L’hypnose, blessure narcissique», Paris, Les Empêcheurs de penser en rond, 1990; avec Philippe Pignarre, «La Sorcellerie capitaliste», Paris, La Découverte, 2005. Le dialogue avec Isabelle Stengers a eu lieu à Rimini près de la Fondation Pio Manzù et dans la ville de Modène, près de la Fondation Collegio San Carlo pendant le festival international de la philosophie.

Antonio Torrenzano. Dans votre dernier livre, vous écrivez : nous avons changé d’époque, l’éventualité d’un bouleversement global du climat s’impose désormais. Pollution, empoisonnement par les pesticides, épuisement des ressources, baisse des nappes phréatiques, inégalités sociales croissantes ne sont plus des problèmes pouvant être traités de manière isolée. Le réchauffement climatique a des effets en cascade sur les êtres vivants, les océans, l’atmosphère, les sols. Pourquoi la communauté internationale est-elle totalement incapable de prendre acte de la situation ?

Isabelle Stengers. La situation représente une énorme instabilité et tout cela, chacun nous le sait. Notre mode de croissance contemporaine, irresponsable, voire criminelle, doit être maintenue coûte que coûte. J’ai l’impression que la diminution de la pensée est généralisée : le régime capitaliste ne peut que penser à court terme. Notre planète est chatouilleuse, ce n’est pas une bonne mère et nous sommes capables de susciter des réactions de sa part qui peuvent signifier la disparition des ressources sur lesquelles nous comptons pour vivre. Nos sociétés exploitent et détruisent sans penser pour des bénéfices à court terme sans prendre en compte les conséquences. Nous allons vers un avenir extrêmement agité, et nous le sentons sur un mode de perplexité, de désarroi, de radicale impotence. On est en train d’habituer nos populations à accepter comme malheureusement nécessaires des situations qui étaient encore jugées intolérables il y a trente ans.

Antonio Torrenzano. L’occident, malgré le désastre de la crise économique et financière, il continue à chercher de possibles solutions dans une croissance économique effrénée et dans le profit. Quand on parle d’écologie, de protection de l’environnement, mais dit un jour Jean Malaurie, ce sont des considérations qui, avec le temps, deviennent des idées paresseuses. On en parle, elles agitent les esprits et puis l’été passe, Noël arrive et on les oublie. Un autre modèle dans cette brume de l’avenir est-il possible ?

Isabelle Stengers. Le réchauffement climatique, ce n’est pas une crise circonscrite à un lieu. Le réchauffement atmosphérique est une crise mondiale. Plus inquiétante encore est la remise de ce problème aux lois du marché et aux intérêts des États. Le marché économique qui s’occupe de la marche du monde et de la planète : la dernière barbarie. Nos évolutions sont compliquées et parfois incohérentes et je ne suis pas une catastrophiste. Mais, la communauté internationale devra prendre en considération les conséquences de ce bouleversement mondial du climat et les risques graves et/ou irréversibles pour l’environnement et pour la santé des individus.

Antonio Torrenzano

 

 

*Un particulier remerciement au photoreporter Nobert Rosing pour l’image. La photo reprend une femme du peuple Inuit avec son enfant.

 

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Ouverte sur de grandes ambitions, la réunion internationale des Nations Unies sur le réchauffement climatique à Copenhague pourrait ne déboucher sur aucun accord. La communauté internationale tente actuellement de se mettre d’accord pour donner une suite au protocole de Kyoto, mais les discussions se heurtent d’un côté par les réticences des pays développés à s’engager sur la réduction d’émission de CO2 et à aider financièrement les pays en développement; à leur tour les pays en voie de développement qui dénoncent les pays occidentaux de vouloir tuer le protocole de Kyoto.

Le protocole impose aux trente-sept pays industrialisés plus à l’Union européenne qui l’ont ratifié de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. Pour les pays en développement, qui sont en revanche exonérés de ces obligations, ce document juridique il est encore une valide garantie. La première période d’engagement du protocole arrive à échéance fin 2012. Les pays en développement veulent être certains qu’elle sera prorogée pour une deuxième tranche jusqu’en 2020. La conférence sur le climat voit quotidiennement des failles s’ouvrir et des forces s’affronter entre pays en voie de développement et pays industrialisés. Mais ces altercations se développent aussi entre les deux principaux pollueurs de la planète : la Chine et les États-Unis. « La Chine appelle les États-Unis à faire plus, les États-Unis appellent la Chine à faire plus. J’espère que, dans les jours qui viennent, tout le monde appellera tout le monde à faire plus », a ironisé en fin de semaine dernière Yvo de Boer, le secrétaire exécutif de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC).

Pour travailler, les politiques ont désormais en main un texte central rendu public il y a quelques jours. Un document qui souligne en précisant que la hausse des températures ne devra pas excéder 2°C par rapport à 1990. Le texte, en revanche, laisse en suspens un grand nombre de points comme, par exemple, les financements que les pays industrialisés utiliseront pour aider les pays en développement à financer leur adaptation au changement climatique. Une question à laquelle les pays du Sud sont particulièrement attentifs surtout pour les conséquences néfastes sur leurs territoires et leurs populations. Mais le temps se resserre et les ministres sont en train de passer de nuits autour de la table de négociations pour débloquer la situation tangible pas du tout facile. Aujourd’hui, les premiers chefs d’État ou de gouvernement arriveront à Copenhague. Cent trente, selon la dernière communication des Nations Unies.

Antonio Torrenzano

 

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Dès le début des années 1970, les États membres de l’ONU ont pris conscience de l’urgence à prendre en charge la préservation de l’environnement au rang mondial. En 1972, la Conférence des Nations Unies sur l’environnement adopte la Déclaration de Stockholm, qui contient les premiers grands principes d’une gestion rationnelle de l’environnement compatible avec le développement économique. De cette réunion découle la création du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), un organisme basé à Nairobi et chargé d’aider les pays en développement dans leur stratégie de croissance. La Déclaration de Stockholm devient donc l’introduction à une gestion internationale du climat.

En 1988 nait le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). Créé à l’initiative de l’organisation météorologique mondiale (OMM) et du programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), le GIEC a pour objectif d’évaluer les informations scientifiques, techniques et socioéconomiques disponibles concernant la question du changement climatique d’origine humaine. Le GIEC n’a pas de laboratoire ; il se définit comme un endroit d’expertise visant à synthétiser des travaux menés dans les laboratoires du monde entier. En juin 1992, les représentants des États membres se retrouvent à Rio, au Brésil, à l’occasion de la conférence des Nations Unies sur l’environnement et le développement. Cette réunion comporte trois volets : l’élaboration de l’Agenda 21, un plan détaillé d’action mondiale dans tous les domaines du développement durable, la Déclaration de Rio, qui définit les droits et les responsabilités des nations en matière environnementale. La déclaration de Rio reconnaît trois grands principes : le principe de précaution, le principe des «responsabilités communes, mais différenciées» (responsabilités partagées par l’ensemble de la communauté internationale, mais soutien financier et technique nécessaire aux pays en développement), et le principe du droit au développement. À l’issue des négociations, une convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques a été rédigée puis progressivement adoptée par les États membres.

Élaboré en 1997, le Protocole de Kyoto fixe les premiers objectifs chiffrés de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour chacun des États qui ont signé le protocole, pour la période 2008-2012. Les pays de l’OCDE se sont engagés à réduire leurs émissions de 5,2% en moyenne par rapport à leur niveau de 1990. Entré en vigueur en 2005, le Protocole de Kyoto met en exergue les oppositions entre pays industrialisés et pays en développement, les seconds étant exemptés de tout engagement afin que leur développement économique ne soit pas remis en cause. C’est notamment pour cette raison que le Sénat américain n’a jamais souhaité ratifier le Protocole de Kyoto, malgré la signature du président Bill Clinton. En 2007, le GIEC reçoit, conjointement avec l’américain Al Gore, le Prix Nobel de la paix. Dans la même année, les pays signataires du Protocole de Kyoto se réunissent à Bali en ayant comme objectif la réduction de 25 à 40% des émissions de gaz à effet de serre des pays industrialisés d’ici 2020 par rapport à 1990.

La conférence s’achève avec l’adoption de la « feuille de route de Bali » qui met en place un processus de négociation incluant pays industrialisés et pays en développement à conclure avec le sommet de Copenhague. Les négociations du sommet de Copenhague sur le réchauffement climatique sont complexes pour qui n’a pas suivi la feuille de route de Bali. Voici alors certains chiffres pour mieux comprendre la situation et l’objet de négociations : + 2°C, c’est le scénario le plus optimiste du réchauffement climatique d’ici la fin du siècle le selon le dernier rapport du Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). La concentration réelle de CO2 dans l’atmosphère est de 385 parties par million (ppm), supérieure de 38% à l’ère pré-industrielle. Le GIEC recommande de réduire la concentration de CO2 dans l’atmosphère à 350 ppm. 41 % est le pourcentage des émissions mondiales de CO2 produites par la Chine et les États-Unis. C’est aussi le pourcentage des émissions mondiales de CO2 générées par la production d’électricité et le réchauffement des ménages, les secteurs les plus polluants.

Le 20 %. est la part des émissions de CO2 générées par la déforestation. Les forêts tropicales sont de grands réservoirs de CO2, un gaz relâché dans l’atmosphère si celles-ci brûlent. La progression de l’agriculture sur brûlis et de l’élevage au Brésil, ainsi que le déboisement des forêts indonésiennes pour produire d’huile de palme seraient les causes principales de la déforestation. Plus 0.76°C c’est la hausse de la température moyenne de l’air enregistrée depuis un siècle. Les dégâts déjà causés par cette augmentation sont considérables : destruction des cultures et des sols, pénuries d’eau, multiplication des phénomènes climatiques extrêmes. 286 milliards de tonnes, ils sont les tonnes de glace perdues annuellement par le Groenland. La fonte des glaces causée par le réchauffement climatique s’est accélérée entre 2006 et 2009. Encore, 86 milliards d’euros sont la somme des transactions réalisées en 2008 sur le marché du carbone, selon le dernier rapport de la Banque mondiale. Malgré la crise financière internationale, ce montant a doublé depuis 2007. Enfin, l’agriculture qui ne souffre pas seulement des conséquences du changement climatique, mais elle est également responsable de 14% des émissions mondiales de gaz à effet de serre.

Celles-ci sont donc les chiffres et depuis mardi ces données ont inauguré les discussions techniques sur l’état de la planète pour rejoindre à un nouvel accord international entre le 18 décembre.

Roberta Barbera

Antonio Torrenzano

 

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Conversation avec Amartya Sen, économiste, prix Nobel pour l’économie en 1998 pour ses travaux sur la famine, sur la théorie du développement humain, sur l’économie du bien-être, sur les mécanismes fondamentaux de la pauvreté et sur le libéralisme politique. De 1998 à 2004, il a été le directeur du Trinity college à l’université de Cambridge devenant ainsi le premier universitaire asiatique à diriger un des collèges de l’université. Amartya Sen est aussi partie prenante dans le débat sur la mondialisation. Il est le président honoraire de l’ONG Oxfam. Parmi ses nombreuses contributions sur l’économie du développement, Amartya Sen a fait des études sur les inégalités entre les hommes et les femmes. Il est aujourd’hui professeur à l’université américaine Harvard. Auteur de nombreux essais, livres traduits en plus de trente langues, dont «L’économie est une science morale?», Paris, La Découverte, 2004; «Rationalité et liberté en économie», Paris,Odile Jacob, 2005; «La Démocratie des autres : pourquoi la liberté n’est pas une invention de l’Occident», Paris, Payot, 2005;«L’Inde. Histoire, culture et identité» et «Identité et violence», toujours aux éditions Odile Jacob, Paris, 2007. Le dialogue avec le prix Nobel a eu lieu à Milan pendant les journées d’étude sur l’économie coopérative, au mois de février 2009.

Antonio Torrenzano. Le gaz à effet de serre, il est un problème ouvert que l’Humanité a avec son propre avenir. Nous en voyions déjà les conséquences: augmentations très élevées de température pendant les mois d’été, des inondations désastreuses, longues périodes de sécheresse dans certaines régions de l’Afrique ou de l’Asie, le progressif dégel des glaciers. Pourquoi une économie verte est-elle nécessaire ?

Amartya Sen. C’est un devoir que nous ne pouvons plus renvoyer. La défense de la planète est une exigence pour la sauvegarde de l’humanité. Ce sujet autant que la pauvreté concerne tout le monde. Et tous les pays doivent aller au-delà de leurs intérêts pour contribuer à l’amélioration de la santé de la planète. Agir maintenant, il nous pourrait d’apporter au moins trois types d’avantage. Les investissements pour une économie verte peuvent être une stimulation pour aider les pays développés vers un nouveau système, les mêmes peuvent donner aussi une très haute contribution à l’expansion de l’économie des pays pauvres. Troisième avantage : les populations des pays en voie de développement en vivant dans le même monde unique ils amélioreraient leurs conditions de vie. La sauvegarde du milieu local par des mesures d’adaptation peut augmenter la qualité de la vie des habitants qui vivent dans les pays en voie de développement.

Antonio Torrenzano. Dans un ancien entretien toujours sur l’urgence d’une révolution verte, l’ancien secrétaire des Nations Unies Kofi Annan a-t-il affirmé: « protéger l’environnement coûte cher. Ne rien faire coûtera beaucoup plus cher». La communauté occidentale a-t-elle compris cette urgence ?

Amartya Sen. Les économies des pays développés doivent faire face à leurs responsabilités dans la réduction des émissions. Le monde occidental a vécu sur le mirage de l’autocontrôle des marchés et même de la Nature. En réduisant la surveillance et le rôle de la vigilance sur la finance et sur la production industrielle, on a construit une bombe à l’horlogerie prête à éclater. La communauté internationale se trouve à présent avec l’obligation de réécrire de nouvelles règles, car il ne s’agit plus d’un simple cours cyclique de récession économique.

Antonio Torrenzano. Un nouveau capitalisme vert ? J’espère qu’il ne sera pas un autre oxymore.

Amartya Sen. Je suis très sceptique quand j’entends parler de nouveau capitalisme. En réalité, je ne sais pas combien d’utilité a aujourd’hui le terme capitalisme. Je crois que nous avons la nécessité d’un nouvel équilibre entre institutions financières et comme les institutions internationales pourront garantir ce nouvel équilibre économique fondé sur principes d’équité et redistribution de la richesse vers tous.

Antonio Torrenzano

 

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Inondations, pluies imprévisibles, avancement du désert, la sécheresse. Le continent africain souffrira plus que tous les autres continents le réchauffement climatique. Pour Robert Molteno, physicien et historien près du School of Oriental and African Studies de Londres, ce sont deux les raisons pour lesquelles le changement climatique met en danger les habitants de l’Afrique.

La première raison est de nature économique. Dans le continent africain, la pauvreté empêchera à nombreux gouvernements de réaliser celles qui s’appellent «mesures d’adaptation». Elles sont des actions nécessaires à protéger les habitants des effets les plus graves du changement climatique dans le bref et dans le moyen terme. Oeuvres structurales comme barrières à la défense des villes côtières, reforestation sur vastes surfaces ou d’autres mesures pour contenir l’avancement des déserts et initiatives similaires. Le second motif pour lequel le changement climatique sera particulièrement dangereux pour l’Afrique réside dans le fait que les régions tropicales et subtropicales, c’est-à-dire la plus grande partie du continent africain, subiront le pire avec l’augmentation de la température. Des exemples et de possibles projections, ils peuvent faire nous apercevoir comme le réchauffement pourra influer négativement sur ces territoires.

L’augmentation de la température dans les zones équatoriales de l’Afrique devrait produire des effets dans les déserts et dans les régions semi-arides du Sahel, du Sahara et dans la Corne de l’Afrique autant qu’en Namibie et en Afrique centrale. Le réchauffement climatique dans ces zones produirait de précipitations pluvieuses imprévisibles et moins abondantes. Cette diminution des pluies, elle pourrait intensifier encore plus les processus de désertification et de réduction de terres cultivables. Dans les forêts pluviales, au contraire, un climat plus sec augmenterait en pourcentage le risque d’incendie et donc des conséquences très graves pour les populations de ces régions africaines. Mais l’augmentation de température, elle aurait d’effets aussi dans les régions côtières. Avec l’élévation du niveau de la mer, par exemple, les villes comme Lagos, Alexandrie d’Égypte ou Cap Touwn en Agrique du Sud seraient exposées plus aux tempêtes et à des inondations.

Pour ce qui concerne, en revanche, le calendrier temporel par lequel ceux-ci et d’autres effets ils se feront entendre, il affirme Robert Molteno, les recherches scientifiques sont en train de devenir de plus en plus précises au niveau général, mais ils restent encore des incertitudes sur les territoires spécifiques ou sur des régions microclimatiques déterminées. Cependant, il est déjà devenu clair qu’en Afrique aujourd’hui le climat est plus imprévisible. Les phénomènes atmosphériques de très grande intensité sont augmentés et les précipitations pluvieuses sont diminuées. L’Afrique n’ayant jamais été dans le passé la responsable pour le relâchement dans l’atmosphère des gaz qui ont altéré le climat, elle se trouve victime aujourd’hui d’un phénomène mondial sur laquelle n’a pas d’autorité. Aux habitants des 52 États du continent il restera le difficile problème de quelles «mesures d’adaptation» prendre afin de réduire les conséquences que le réchauffement de la planète lui renversera sur leurs têtes.

Antonio Torrenzano

 

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Appel de Kofi Atta Annan, ancien secrétaire général des Nations Unies de 1997 à 2006, lauréat du Prix Nobel de la paix le 10 décembre 2001. Kofi Annan a été nommé le 14 juin 2007 à la tête de l’Alliance pour une révolution verte en Afrique (AGRA), un organisme créé en 2006, financé par la fondation Bill et Melinda Gates et la Fondation Rockefeller avec le but d’aider les paysans africains à améliorer leur rendement. Dans la même année, le 4 octobre 2007, Kofi Annan est devenu le nouveau Président de la Fondation de soutien mondial contre la torture, la plus importante coalition internationale d’ONG actives dans la protection des droits de l’homme dans le monde. Il préside également, depuis sa création en 2007, l’African Progress Panel, rassemblement de personnalités internationales engagées dans la défense du continent africain. Auteurs de nombreux essais, traduits dans plusieurs langues diplomatiques, dont «Nous les peuples : le rôle des Nations unies au XXIe siècle», «Appel à l’action», «Rénover les Nations Unies». Avec le journaliste James Traub du New York Times, il a écrit « The Best Intentions: Kofi Annan and the UN in the Era of American World Power», Farrar, Straus and Giroux, 2006. http://www.timeforclimatejustice.org

 

 

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Appel de Desmond Mpilo Tutu, archevêque sud-africain, prix Nobel de la paix en 1984. Il a été le président de la Commission de la vérité et de la réconciliation, chargée de faire la lumière sur les crimes et les exactions politiques commis durant la période de politique d’apartheid au nom des gouvernements sud-africains, mais également les crimes commis au nom des mouvements de libération nationale.

Desmond Tutu devient président de la Commission de la vérité et de la réconciliation, créée par le président Nelson Mandela, en 1995. Après trois ans d’enquêtes et des milliers d’auditions, il rend publiques les conclusions de la commission en 1998. Ce dossier est aujourd’hui considéré comme une des pierres angulaires de la réconciliation sud-africaine. Il a été nommé en 2005, par l’ancien secrétaire général de l’ONU Kofi Annan, membre du Haut Conseil pour l’alliance des civilisations.

 

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À Leurs Excellences.

Les Chefs d’État ou de Gouvernement.

À l’aube de ce siècle nouveau, le Sommet des Nations Unies sur le climat sera l’occasion historique de rassembler les plus hautes instances politiques à la sauvegarde de la planète. La Terre souffre. Notre Terre mère ne souffre que trop et déjà les signes sont annoncés. Notre mère Terre gronde et demain elle rugira de colère. Ce réchauffement a sans doute des raisons géophysiques et humaines, naturelles et culturelles. Mais la brume de notre pensée empêche de discerner le sens des politiques écologiques suivies. Le réchauffement accéléré en est responsable et nous sommes à cet égard, comme citoyens de la planète, dans les plus grandes expectatives.

Excellences, vous avez l’occasion historique à Copenhague de construire un autre modèle et de rendre hommage à la planète où nous vivons tous. Dans le Nord, comme dans le Sud, comme en Occident, comme en Orient, il faut que la conscience de tous devienne une conscience écologique. L’homme n’est pas venu sur Terre pour domestiquer la Nature, mais pour s’y intégrer en la respectant. Il y a une force spirituelle que la Nature nous envoie par le bleu du Ciel, dans la corolle des fleurs éphémères, la fragilité et la beauté des fleurs, dans la force d’un arbre d’olivier qui regarde avec sa force constructive et tenace à l’éternité.

Pour le peuple Inuit, le souffle du vent peut, dans ses ondes sonores, être interprété comme un message de l’au-delà, du pays des morts. Nous trouvons aussi comme notre éclaireur les paroles prononcées en 1854 du chef Amérindien Seattle devant l’assemblée des tribus d’Amérique du nord en réponse au président de l’époque G.Cleveland:

«Nous savons que l’homme blanc ne comprend pas nos moeurs. Une parcelle de Terre ressemble pour lui à la suivante, car c’est un étranger qui arrive dans la nuit et prend à la Terre ce dont il a besoin. La Terre n’est pas sa soeur, mais son ennemi, et lorsqu’il la conquise, il va plus loin. Il abandonne la tombe de ses aïeux, et cela ne le tracasse pas. Il enlève la Terre à ses enfants et cela ne le tracasse pas. La tombe de ses aïeux et le patrimoine de ses enfants tombent dans l’oubli. Il traite sa mère la Terre , et son frère le Ciel, comme des choses à acheter, piller, vendre comme les moutons ou les perles brillantes. Son appétit dévorera la Terre et ne laissera derrière lui qu’un désert.

Je ne sais pas. Nos moeurs sont différentes des vôtres. La vue de vos villes fait mal aux yeux de l’homme rouge. Mais peut-être est-ce parce que l’homme rouge est un sauvage et ne comprend pas. Il n’y a pas d’endroit possible dans les villes de l’homme blanc. Pas d’endroit pour entendre les feuilles se dérouler au printemps ou le froissement des ailes d’un insecte. Mais peut-être est-ce parce que je suis un sauvage et je ne comprends pas. Le vacarme semble seulement insulter les oreilles. Et quel intérêt y a-t-il à vivre si l’homme ne peut entendre le cri solitaire de l’engoulevent ou les palabres des grenouilles autour d’un étang la nuit ? Je suis un homme rouge et ne comprends pas.

L’Indien préfère le son doux du vent s’élançant au-dessus de la face d’un étang, et l’odeur du vent lui-même, lavé par la pluie de midi ou parfumé par le pin pignon. L’air est précieux à l’homme rouge, car toutes choses partagent le même souffle, la bête, l’arbre, l’homme, ils partagent tous le même souffle. L’homme blanc ne semble pas remarquer l’air qu’il respire. Comme un homme qui met plusieurs jours à expirer, il est insensible à la puanteur. Mais si nous vous vendons notre Terre, vous devez vous rappeler que l’air nous est précieux, que l’air partage son esprit avec tout ce qu’il fait vivre. Le vent qui a donné à notre grand-père son premier souffle a aussi reçu son dernier soupir. Et si nous vous vendons notre Terre, vous devez la garder à part et la respecter, comme un endroit ou l’homme blanc peut aller goûter le vent adouci par les fleurs des prés. Comment pouvez-vous acheter ou vendre le Ciel, la chaleur de la Terre ? L’idée nous paraît étrange. Si nous ne possédons pas la fraîcheur de l’air et le miroitement de l’eau, comment est-ce que vous pouvez les acheter ? Chaque parcelle de cette Terre est sacrée pour mon Peuple.Chaque aiguille de pin luisant, chaque rive sableuse, chaque lambeau de brume dans les bois sombres, chaque clairière et chaque bourdonnement d’insecte sont sacrés dans le souvenir et l’expérience de mon peuple. La sève qui coule des arbres transporte les souvenirs de l’homme rouge. Les morts des hommes blancs oublient le pays de leur naissance lorsqu’ils vont se promener parmi les étoiles. Nos morts n’oublient jamais cette Terre magnifique, car elle est la mère de l’homme rouge. Nous sommes une partie de la Terre, et elle fait partie de nous.

Les fleurs parfumées sont nos soeurs, le cerf, le cheval, le grand aigle, ce sont nos frères. Les crêtes rocheuses, les sucs dans les prés, la chaleur du poney et l’homme tous appartiennent à la même famille. Aussi lorsque le grand chef de Washington envoie dire qu’il veut acheter notre Terre. Le grand chef envoie dire qu’il nous réservera un endroit de façon que nous puissions vivre confortablement entre nous. Il sera notre père et nous serons ses enfants. Nous considérerons donc votre offre d’acheter notre Terre. Mais ce ne sera pas facile. Car cette Terre est sacrée. Cette eau scintillante qui coule dans les ruisseaux et les rivières n’est pas seulement de l’eau, mais le sang de nos ancêtres. Si nous vous vendons de la Terre, vous devez vous rappeler qu’elle est sacrée et que chaque reflet spectral dans l’eau claire des lacs parle d’évènements et de souvenirs de la vie de mon peuple. Le murmure de l’eau est la voix du père de mon père. Les rivières sont nos soeurs, elles étanchent notre soif. Les rivières portent nos canoés et nourrissent nos enfants.

Si nous vous vendons notre Terre, vous devez désormais vous rappeler, et l’enseigner à vos enfants, que les rivières soient nos soeurs et les vôtres, et vous devez désormais montrer pour les rivières la tendresse que vous montreriez pour une soeur. Nous considérerons donc votre offre d’acheter notre Terre. Mais si nous décidons de l’accepter, j’y mettrai une condition : l’homme blanc devra traiter les bêtes de cette Terre comme ses frères. Je suis une personne et je ne connais pas d’autre façon de vivre. J’ai vu un millier de bisons pourrissant sur la prairie, abandonnés par l’homme blanc qui les avait abattus d’un train qui passait.

Je suis une personne et je ne comprends pas comment le cheval de fer fumant peut-être plus important que le bison que nous tuons que pour subsister. Qu’est-ce que l’homme sans les bêtes ? Si toutes les bêtes disparaissaient, l’homme mourrait d’une grande solitude d’esprit. Car ce qui arrive aux bêtes arrive bientôt à l’homme. Toutes les choses se tiennent. Vous devez apprendre à vos enfants que le sol qu’ils foulent est fait des cendres de nos aïeux. Pour qu’ils respectent la Terre, dites à vos enfants qu’elle est enrichie par les vies de notre race.

Enseignez à vos enfants tout ce que nous avons enseigné aux nôtres, que la terre est notre mère. Tout ce qui arrive à la Terre arrive aux fils de la Terre. Si les hommes crachent sur le sol, ils crachent sur eux-mêmes. Nous savons au moins ceci : la Terre n’appartient pas à l’homme, l’homme appartient à la Terre. Cela, nous le savons. Toutes choses se tiennent comme le sang unit une famille. Toutes choses se tiennent. Tout ce qui arrive à la Terre arrive aux fils de la Terre. Ce n’est pas l’homme qui a tissé la trame de la vie : il en est seulement un fil. Tout ce qu’il fait à la terre, il le fait à lui-même […] ».

Excellences, depuis des millénaires, les peuples de l’Afrique, les peuples Amérindiens, de l’Amazonie, les peuples autochtones d’Australie, eux, le savent. Et, ce n’est pas par hasard qu’ils résistent dans toutes les contrées du Monde. Il y a près d’eux comme un sens de l’Histoire jamais oubliée. Nous vous prions de retrouver ce sens, de rejoindre à Copenhague un accord international ambitieux et rendre hommage ainsi au Panthéon de l’Humanité.

Fabio Gualtieri

Claudio Poletti

Antonio Torrenzano

 

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Conversation avec Susan Solomon, chimiste, elle est aujourd’hui chef du Chemistry & Climate Processes Group de la division des sciences chimiques du National Oceanic & Atmospheric Administration. Elle a aussi servi en tant que coprésidente du premier groupe de travail du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat. Susan Solomon a été une des premières personnes à avoir avancé la responsabilité des chlorofluorocarbures dans la formation du trou de la couche d’ozone. En 1986 et 1987, elle dirige une expédition étudiant le trou dans la couche d’ozone dans le détroit de McMurdo en Antarctique. Son équipe trouve des niveaux d’oxyde de chlore dans l’atmosphère plus élevés que prévu, créés par les chlorofluorocarbures (CFC). Susan Solomon démontre également que les volcans peuvent accélérer les réactions chimiques que produisent les chlorofluorocarbures dans l’atmosphère, et ainsi augmenter les dégâts causés à la couche d’ozone. Son travail est à la base du protocole de Montréal de l’Organisation des Nations Unies, un accord international visant à protéger la couche d’ozone en limitant et régulant les substances l’endommageant. En 2007, elle a reçu le Prix Nobel de la paix pour son travail au sein du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat. L’entretien a eu lieu à Bologne, au mois de septembre 2008, près de l’université de Bologne, pendant la IVe réunion du symposium international SPARC (Stratospheric Processes and Their Role en Climate).

Antonio Torrenzano. Le changement climatique avec le pillage de la nature et la pollution, ils sont sans doute les plus dangereuses menaces contemporaines.Votre collègue, Rajendra Pachauri, dans un autre entretien publié sur ce carnet numérique, il m’a répondu que le réchauffement climatique est une menace, mais aussi un problème éthique : « l’intérêt de l’individu doit-il être conjugué avec l’intérêt commun et tous les individus doivent comprendre que sauvegarder l’état de santé de notre planète est un devoir ».

Susan Solomon. Le problème du changement climatique va se poser sur le long terme à côté d’autres questions d’une importance capitale par exemple les changements dans les précipitations, les changements dans les sécheresses, dans les fortes pluies, dans l’intensité des ouragans, des changements dans le niveau de la mer ou dans l’évolution des glaciers. La question sur le réchauffement climatique ce n’est pas que le début.

Antonio Torrenzano. Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) a produit dans les derniers mois plusieurs rapports sur les recherches effectuées sur les effets du réchauffement global et l’évolution du climat. Pouvez nous expliquer le système d’évaluation du GIEC ?

Susan Solomon. En général, un résultat scientifique est produit par une personne ou une équipe et, avant son édition dans les revues «Science», le résultat obtenu est examiné par deux ou trois spécialistes du secteur de recherche. Ces spécialistes produiront de commentaires et après le résultat sera diffusé. Le processus de vérification du GIEC, en revanche, demande de passer par trois niveaux de vérification, par plus de 600 examinateurs et 30 000 commentaires auxquels l’auteur devra répondre dans une manière très détaillée. Ensuite, un scientifique du GIEC, il se trouvera dans une salle en face à 120 dirigeants et il devra les convaincre de chaque mot et de chaque ligne du résultat qui résume notre position. Ce parcours de vérification soumet le travail scientifique à une surveillance minutieuse et intense. Voila la manière de procéder du GIEC, car son rôle consiste seulement à évaluer de recherches.

Antonio Torrenzano. En 1986 et 1987, vous avez dirigé l’expédition en Antarctique étudiant le trou dans la couche d’ozone dans le détroit de McMurdo. Et avec votre équipe, vous avez trouvé des niveaux d’oxyde de chlore dans l’atmosphère plus élevés que prévu, créés par les chlorofluorocarbures (CFC). Votre découverte scientifique montrait que ces molécules avaient des effets potentiels sur la réduction de la couche d’ozone et elles touchaient la santé de chaque individu avec nombreux risques pour une augmentation en pourcentage de cancer de la peau ou de cataracte. Encore, ces molécules étaient des produits industriels très nocifs pour la santé de tous. Dans ce cas, le protocole de Montréal fut ratifié par un vote unanime presque par toute la communauté internationale. Pour le CO2, au contraire, que tout le monde produit et qui est nocif quand sa concentration est excessive, le protocole de Kyoto n’a pas eu le même destin.

Susan Solomon. Il a été plus facile pour la population de comprendre que les CFC étaient nocifs. La réaction au sujet du climat est différente, sans doute. Mais il ne faut pas mésestimer l’action des individus parce que ce n’est pas la population qui décide de signer ou de ne pas signer de protocoles. Ce sont les gouvernements poussés par d’autres forces et intérêts économiques. Le monde entier est en transition après la crise économique. Dans tout cas, je ne pense pas que cela va arrêter les initiatives de longue durée contre le réchauffement climatique.

Antonio Torrenzano