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La réunion du G20 à Saint-Pétersbourg a pris fin. La déclaration finale du sommet souligne les problèmes de la stabilité de la croissance de l’économie mondiale et la création de nouveaux emplois. Le président de Russie Vladimir Poutine a déclaré pendant sa conférence de presse qui est nécessaire de créer les conditions afin d’améliorer la situation dans l’économie mondiale.

 

Poutine a affirmé : « l’essentiel est d’assurer les conditions de base pour assainir l’économie mondiale par le biais de son développement qualitatif ». Le président russe a noté que pour cette raison « les questions relatives à la stimulation de la croissance économique et de la création d’emplois ont été au centre de la présidence russe dans le G20 ».

 

L’économie mondiale a besoin d’un développement stable et non pas d’une assurance contre les crises, a encore déclaré le président Vladimir Poutine. La ville australienne de Brisbane accueillera le prochain forum du G20 en novembre 2014.

 

Antonio Torrenzano

 

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Sur l’évasion fiscale, les chefs d’État et de gouvernement réunis à Saint-Pétersbourg ont trouvé une consistante unanimité en approuvant la règle de l’échange automatique d’informations parmi les administrations fiscales pour traquer les fraudeurs.

 

« Sur l’évasion fiscale, le communiqué final du G20 sera très ferme et complet », a affirmé la délégation de l’Organisation de coopération et de développement économiques. Ce plan d’action élaboré par l’organisation et approuvé avec quelques difficultés par la réunion des grands argentiers à Moscou en juillet 2013 sera parmi les conclusions endossées par le G20. Cette mesure ne sera pas un simple répertoire de bonnes intentions, mais une liste de 15 actions très concrètes. Le changement … « le plus radical du système fiscal depuis les années 1920 » assure l’OCDE.

 

L’un des éléments clefs de ces lignes d’action toujours selon l’OCDE : ce sera celle de faire du ménage dans les accords bilatéraux permettant aux multinationales de ne pas payer deux fois les impôts sur leurs revenus dans deux pays différents. Par ces textes, certains groupes ont profité pour non seulement ne pas payer deux fois, mais pour ne pas payer du tout.

 

Le forum économique a déjà élaboré un calendrier précis pour la mise en application:d’ici juin 2014, mettre au point une sorte de guide pratique très concret sur les modèles d’échanges de ces informations, notamment au niveau des banques, et sur les autorités compétentes pour les appliquer. Pour l’OCDE « ce plan d’action est un succès du G20. Ce ne sont pas seulement des mots, mais du concret ». C’est la première fois depuis les réunions de la crise du 2007/2008, que le G20 mit sous surveillance des concentrations d’entreprises, des structures d’investissement opaques, les multinationales. Selon Anton Siluanov, ministre russe des finances, il n’était plus possible de tolérer que certains groupes (comme Google ou Amazon) «puissent faire de l’argent dans un pays et payer des impôts plus bas dans d’autres ». Ces mesures avaient été proposées par l’OCDE.

 

Antonio Torrenzano

 

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Le dossier syrien a été le principal thème abordé pendant la première journée des travaux du forum du G20 à Saint-Pétersbourg. Comme c’était déjà prévisible et comme beaucoup d’analystes l’avaient déjà souligné dans les jours précédents, l’affaire Syrie a dominé l’ouverture de la réunion économique.

 

Des têtes à têtes parmi tous les chefs d’État et de gouvernement se sont développées tout l’après-midi. Une discussion officielle, au contraire, a eu lieu jeudi soir à l’initiative de Vladimir Poutine pendant le diner de gala du G20. Diner traditionnellement consacré aux questions économiques dans les passées éditions. La journée de jeudi a été consacrée à des discussions bilatérales. Barack Obama a rencontré le Premier ministre japonais Shinzo Abe. François Hollande s’est entretenu avec le chef du gouvernement turc Recep Tayyip Erdogan lui aussi favorable à une intervention militaire. Juste avant le diner d’hier soir, les représentants des cinq pays européens présents se sont réunis avec les dirigeants de l’Union européenne pour trouver une position commune. La question syrienne s’annonce compliquée aussi à l’échelle diplomatique.

 

La poignée de main entre le président américain et le président russe à l’ouverture du forum a résumé toute seule la tension qui domine cette réunion internationale de Saint-Pétersbourg. Un autre signe ? Lors du dîner de gala, Vladimir Poutine et Barack Obama auraient dû se retrouver à côté en vertu de l’alphabet cyrillique. Afin de les séparer, c’est l’alphabet romain qui a été employé au dernier moment… Une ambiance glaciale digne de la guerre froide. Pour Moscou et Pékin, les deux Pays qui détiennent un droit de veto au Conseil de sécurité de l’ONU, « la situation au moment présent montre que la solution politique est la seule voie possible pour régler la crise», a ainsi déclaré un porte-parole de la délégation chinoise.

 

Antonio Torrenzano

 

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Le G20 a ouvert ses portes aujourd’hui à Saint Saint-Pétersbourg au palais Costantin, l’ancienne résidence d’été de Pier Le Grand. La réunion internationale risque d’être une rencontre très médiatisée plus politique qu’économique.

 

La Syrie reste au cœur des débats bilatéraux et multilatéraux parmi les chefs d’État et de gouvernement de 20 pays présents autant que les enjeux et les possibles solutions pour la région. Pour la première fois depuis les années 2008/2009, les questions économiques ne sont pas le sujet principal. Mais, la large part accordée au dossier syrien ne peut pas faire oublier les dossiers économiques.

 

L’économie européenne n’est pas encore en bonne santé. L’Europe n’est pas sortie du tout de la crise et tous les facteurs de déséquilibres sont encore là. La croissance économique européenne reste très fragmentaire en se développant encore à plusieurs vitesses. Toutes les économies de l’Europe du sud sont encore en difficultés comme l’Italie. Même s’il y a une timide croissance, les économies des pays à la périphérie de la zone euro restent fragiles. L’économie américaine, en revanche, n’arrive pas à créer suffisamment d’emplois malgré une croissance économique qui revient.

 

Et les BRICS ? Ces nations sont en train de vivre un ralentissement des leurs économies. La Chine a rééquilibré son économie pour ne pas être trop dépendant par ses exportations. Mais, le Pays chinois doit encore corriger une autre distorsion : il a trop investi et trop peu consommé. Le défi pour l’économie chinoise sera alors de réussir à avoir une juste croissance entraînée par la consommation et non seulement par les investissements ou les exportations. L’Inde au contraire a un problème de choix de modèle de croissance tandis que le Brésil n’a pas encore corrigé les inégalités parmi ces classes sociales. La société brésilienne, par exemple, reste encore très inégale malgré les efforts des présidents Luiz Inácio Lula da Silva et de Dilma Rousseff aujourd’hui.

 

Il y a enfin le dossier brûlant d’une vraie et définitive régulation du système bancaire et financier. Ce dossier n’a pas trop avancé ni à l’échelle mondiale ni à l’échelle européenne. Sur ce thème, les discussions sont au point mort. Les inquiétudes restent totales, car la finance non régulée a été le poison de la crise en 2007/2008.

 

Antonio Torrenzano

 

 

 

 

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Dans mon essai « Le capitalisme est-il moral ?», paru en 2004, je montrais que la réponse, à la question qui lui servait de titre, était non. Le capitalisme n’est pas moral. D’abord parce que, pour être moral ou immoral, il faut être un individu, un sujet, une personne : un système impersonnel, comme est le capitalisme, n’est ni moral ni immoral. Ensuite parce que, même si on veut, à tort, lui appliquer ce critère de la moralité, le capitalisme, d’évidence, ne saurait y satisfaire. Le capitalisme ne fonctionne pas à la vertu, à la générosité ou au désintéressement. Tout au contraire : il fonctionne à l’intérêt, personnel ou familial ; il fonctionne à l’égoïsme. Cela ne réfute pas le capitalisme, au contraire : le capitalisme fonctionne à l’égoïsme ; c’est pourquoi il fonctionne si fort (l’égoïsme est la principale force motrice).

Bref, le capitalisme n’est ni moral ni immoral: il est amoral. C’est pourquoi il fonctionne si fort, et c’est pourquoi il ne suffit pas : l’égoïsme n’a jamais suffi à faire une civilisation,ni même une société qui soit humainement acceptable. Il faut donc autre chose. Quoi ? Trois « choses », ce que j’ai appelé trois ordres, qui viennent limiter l’ordre économico-techno-scientifique : a) l’ordre juridico-politique (le droit, l’État) ; b) l’ordre de la morale ; c) enfin l’ordre éthique ou l’ordre de l’amour. Cela ne veut pas dire que la morale n’a pas sa place dans l’entreprise. Elle a toute sa place. Laquelle ? La place des individus, autrement dit (si vous travaillez en entreprise) votre place ! Ne comptez pas sur le marché pour être moral à votre place. Les économistes me disent maintenant que mon livre était prémonitoire…Disons plutôt que la crise confirme,bien plus qu’elle n’infirme, mes analyses.

 

1 – D’abord, la crise confirme le caractère amoral du capitalisme. Certains se sont enrichis scandaleusement,y compris en laissant leur entreprise au bord de la faillite (stock-options,parachutes en or,salaires exorbitants, retraites faramineuses, etc.) ; d’autres, qui ont fait leur boulot convenablement, sont ruinés, perdent leur emploi ou restent pauvres. Vous trouvez ça moral ? Les gens sont mus par l’égoïsme. C’est-à-dire par l’intérêt ? Plutôt par la passion. Alan Greenspan,ancien patron de la Fed: « J’ai été déçu par les banquiers; je pensais qu’ils auraient assez conscience de leurs intérêts pour éviter des comportements aberrants ou trop risqués… ». Alain, contre Marx: ce n’est pas l’intérêt qui meut les gens, c’est la passion: passion nationaliste, qui entraîne des guerres contraires à l’intérêt national des pays belligérants, ou passion de l’argent (cupidité) qui pousse à des comportements contraires à nos intérêts financiers. Les banquiers : On découvre qu’ils aimaient l’argent ! Mais seraient-ils banquiers autrement? On découvre que les traders aimaient l’argent et le risque. Mais seraient-ils traders autrement ?

 

2 – La crise confirme que le capitalisme est incapable de se réguler lui même d’une façon qui soit socialement et moralement acceptable. Il y a bien des régulations (par ex. cette crise !) , mais qui n’évitent pas un certain nombre d’effets pervers, qui choquent légitimement nos contemporains. Bref, les ultralibéraux avaient tort – socialement,politiquement et moralement tort (quand bien même ils auraient, ce qui reste à démontrer, économiquement raison).Cf. Jean-Paul Fitoussi: « Il a été scientifiquement démontré que dans un État ultralibéral, ou l’État ne s’occupe absolument pas d’économie,le plein emploi est assuré… pour tous les survivants. »

 

3 – La crise confirme que la morale est tout aussi incapable de réguler l’économie ! Cf. la réaction d’Henry Paulson,Secrétaire au Trésor américaine,et… la mienne, lors de la faillite de Lehmann-Brothers ! Une bonne réaction morale peut s’avérer économiquement catastrophique. Cf.Talleyrand: « Méfiez-vous du premier mouvement : c’est le bon ! » C’est aussi vieux que le capitalisme. Si on avait compté sur la conscience morale des chefs d’entreprise pour améliorer le sort de la classe ouvrière, nous serions toujours au XIXe siècle ou chez Zola. C’est confirmé par cette crise. Si on avait compté sur la conscience morale des banquiers, des financiers et autres spéculateurs pour éviter les crises… nous serions dans la crise que nous connaissons !

 

4 – Conclusion : si le capitalisme est amoral, si l’économie est incapable de se réguler suffisamment elle-même, et si la morale ne parvient pas davantage à la réguler, il ne reste que le droit et la politique. C’est ce qu’on appelle « le retour des États ». Avec un danger : retomber dans les erreurs anciennes. Attention de ne pas retomber dans l’erreur qu’on croyait dépassée : demander à l’État de créer de la richesse ! L’État doit être le garant, non le gérant de l’économie de marché.

 

Andrée Comte Sponville

 

 

*Andrée Comte Sponville, philosophe et enseignant. Ancien élève de l’École normale supérieure de la rue d’Ulm (où il fut l’élève de Louis Althusser), André Comte-Sponville fut longtemps maître de conférences à la Sorbonne (Université Paris I), dont il démissionna en 1998 pour se consacrer exclusivement à l’écriture et aux conférences qu’il donne en dehors de l’Université. Il est l’auteur de nombreux ouvrages dont « Traité du désespoir et de la béatitude» (1984-1988), « Une éducation philosophique » (1989), « L’amour la solitude» (1992), « Petit Traité des grandes vertus » (1995), « Pensées sur l’athéisme » (1999), « Le bonheur désespérément » (2000), « A-t-on encore besoin d’une religion ? » (2003), « L’esprit de l’athéisme» (2006).

 

 

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Le sommet du G20 se déroulera demain cinq et vendredi six septembre 2013 à Saint-Pétersbourg sous la présidence de la Russie. Cette huitième édition de la réunion du G20 sera la première à se dérouler en Russie. L’année dernière, la réunion économique s’était déroulée à Los Cabos au Mexique.

 

Les thèmes de cette rencontre seront nombreux du point de vue de l’économie et en matière diplomatique. Le conflit en Syrie et les tensions au Proche-Orient seront minimums au programme des entretiens bilatéraux qui se tiendront en marge du forum international. Des entretiens entre le président russe Vladimir Poutine et le président chinois Xi Jinping ont été déjà confirmés par le vice-ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Riabkov qui a rencontré lundi passé l’ambassadeur de Chine à Moscou Li Hui. Les interlocuteurs ont échangé leurs vues sur les questions du prochain sommet du G20 de Saint-Pétersbourg, ainsi que sur plusieurs dossiers internationaux, comme le ministère a indiqué dans un communiqué. De sa part, Yang Jiechi, membre du Conseil d’État chinois, avait antérieurement annoncé qu’une rencontre des chefs de gouvernement russe et chinois aurait eu lieu d’ici la fin de l’année.

 

Le G20 de St-Pétersbourg pourra-t-il rapprocher les États-Unis et la Russie ? Les relations entre les deux États sont glaciales. Un air de guerre froide souffle sur les relations russo-américaines. Mais, le cas diplomatique d’Edward Snowden est-il le vrai et la seule pomme de discorde ? Le président américain Barack Obama s’entretiendra, d’une manière ou d’une autre, avec son homologue russe Vladimir Poutine pendant la réunion économique comme le porte-parole de la Maison blanche, Jay Carney a annoncé lundi 26 août.

 

Le G20 réunit les principales économies avancées et émergentes du monde. Le forum est composé de 19 pays : l’Afrique du Sud, l’Allemagne, l’Arabie saoudite, l’Argentine, l’Australie, le Brésil, le Canada, la Chine, la Corée du Sud, les États-Unis, la France, l’Italie, l’Inde, l’Indonésie, le Japon, le Mexique, le Royaume-Uni, la Russie et la Turquie et de l’Union européenne. Ensemble, ses membres représentent environ 90 % du PIB mondial et deux tiers de la population mondiale. Les rencontres du G20 se déroulent toujours avec la participation du Fonds monétaire international (FMI), de la Banque centrale européenne (BCE) et de la Banque Mondiale.

 

Antonio Torrenzano.

 

 

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Conversation avec Mario Vargas Llosa, écrivain, prix Nobel 2010, un des éminents représentants de la littérature latino-américaine contemporaine. L’écriture pour Mario Vargas Llosa a toujours été un instrument au service de l’auteur pour ses idéaux et son amour pour l’Amérique latine. Le 7 octobre 2010, il reçoit le prix Nobel de littérature pour «sa cartographie des structures du pouvoir et ses images aiguisées des résistances, révoltes, et défaites des individus». Quand l’auteur obtint le prix Nobel, il afferma qu’il s’agissait d’un hommage à la littérature latino-américaine. L’auteur donne encore à la littérature de nombreuses missions : par exemple la recherche de nouvelles utopies, la recherche d’une réalité différente de laquelle nous vivons. Mais, si la politique est du côté de la raison, l’écriture, elle se place plutôt du côté de la passion. Mario Vargas Llosa est membre de l’Académie royale espagnole. Il a reçu le Prix Cervantes en 1994; le Prix de Jérusalem en 1995; en 2005, le Irving Kristol Award de l’American Enterprise Institute. La bibliographie de Mario Vargas Llosa est très vaste. Nous rappelons ici : « Lettres à un jeune romancier» 2000; « Un demi-siècle avec Borges », L’Herne, coll. « Essais Philosophie », 2004 et Carnets, 2010; « Le langage de la passion. Chroniques de la fin du siècle », 2005; « Dictionnaire amoureux de l’Amérique latine», 2005; « La tentation de l’impossible. Victor Hugo et Les Misérables», 2008; « Le Monde de Juan Carlos Onetti», 2009; «Le rêve du Celte» inspiré par la vie de Roger Casement en 2011; « Visions d’Amérique latine », 2011; « La civilisation du spectacle », 2012. Essayiste, il est membre de l’Académie Royale espagnole. Il est également chroniqueur dans les colonnes du quotidien El País. L’entretien a eu lieu à Santa Caterina Belice (Agrigento, Sicile) où l’écrivain a reçu le prix littéraire Giuseppe Tomasi di Lampedusa près de l’ancien Palazzo Filangeri, aujourd’hui musée de l’écrivain du Guepard au mois d’août 2013.

Antonio Torrenzano. Aujourd’hui vous êtes en Sicile pour recevoir le prix littéraire Giuseppe Tomasi di Lampedusa. Quelles sont les émotions que ce lieu vous raconte ?

 

Mario Vargas Llosa. Cet endroit m’émeut de manière particulière. Giuseppe Tomasi di Lampedusa a été un écrivain au-dehors de son temps comme Borges, Nabokov. Le Guepard a été un des grands romans du 900. Une oeuvre unique qui n’a pas de précédents et il n’aura jamais d’héritiers. Le Guepard reste encore une oeuvre très vive, puissante. Encore plus que d’autres oeuvres d’écrivains de l’avant-garde de cette époque.

 

Antonio Torrenzano. Quelle est-elle la différence entre la génération d’écrivains comme vous, Gabriel Garcia Marquez, Isabelle Allende et des auteurs de la génération précédente de l’Amérique Latine ?

 

Mario Vargas Llosa. Ma génération en Amérique latine a accordé une grande importance à la forme, à l’aspect technique du roman. En revanche, la génération précédente a considéré comme importants les thèmes historiques en négligeant souvent les aspects purement techniques de l’écriture, de la perspective, de la langue. Pour tous ces auteurs, les aspects formels du texte étaient secondaires, mais ceci a complètement changé avec notre génération.

 

Antonio Torrenzano. Votre roman « Le rêve du Celte » inspiré à la vie de Roger Casement, il raconte d’un patriote irlandais qui a consacré sa vie aux idéaux de justice et liberté jusqu’à la mort. En lisant votre roman, j’ai plusieurs fois comparé la vie de Roger Casement à celle de Giovanni Falcone, le magistrat sicilien tué par la mafia. Un individu qui s’est opposé pour toute sa vie au cancer de la mafia et de l’illégalité. Je crois que Giovanni Falcone autant que Roger Casement, il puisse être le personnage d’un roman historique.

 

Mario Vargas Llosa. Oui, sûrement. La vie de Giovanni Falcone est une histoire humaine merveilleuse qui permet de pénétrer au fond dans le phénomène de la mafia qui a marqué notre temps.

 

Antonio Torrenzano. Jean Baudrillard affirmait par ses écrits que la réalité et la pensée ont disparu dans les écrans. Vous avez beaucoup écrit et réfléchi sur les grandes tragédies du XXe siècle, quelle est-elle votre pensée sur notre époque contemporaine? Cette nouvelle époque peut-elle générer d’individus moins critiques ?

 

Mario Vargas Llosa. Je pense que toute la littérature, la philosophie, la poésie demeurent fondamentales pour la préservation de la liberté et de la citoyenneté. L’école même devrait éduquer à ces principes. Ce n’est malheureusement plus le cas. Pourtant, il faudrait préserver cette curiosité et cet intérêt pour la culture écrite, littéraire, philosophique dans les nouvelles générations, sinon un appauvrissement intellectuel énorme s’ensuivra. Je considère que le pessimisme n’a pas de sens. Toute la littérature nous aide à comprendre mieux notre langue, à penser de manière cohérente, juste, efficace. La littérature abat les frontières au-delà des différences. Les frontières, de cette manière, elles viennent cassées et nous allons au-delà de la langue.

 

Antonio Torrenzano. Antonio Gramsci, il nous rappelle qu’une crise se produit au moment où le vieux monde tarde à disparaitre, et le Nouveau Monde tarde à naitre. Et dans cette période de clair-obscur, il affirmait, des monstres peuvent apparaitre.

 

Mario Vargas Llosa. Le monde dans lequel nous vivons, il est beaucoup plus médiocre de celui-là que nous réussissons à imaginer dans les oeuvres littéraires. L’esprit critique est le meilleur instrument du progrès. Quand nous lisons un roman, nous sommes en train de travailler pour la liberté et pour la fraternité universelle. Comme disait Albert Camus, on peut être pessimiste dans le domaine de la métaphysique, mais pas du point de vue historique, car nous sommes responsables de nos actes et, par conséquent, nous pouvons peser sur la marche du monde. Je crois que tout dépend encore de la politique. Le monde est encore plein de bibliothèques, mais une nouvelle ère culturelle est en train de commencer. Lire toujours des livres, il signifie libérer notre cerveau de l’esclavage des stéréotypes, contribuer à la liberté, augmenter notre esprit critique et apprendre une fraternité universelle.

Antonio Torrenzano. Après la chute du Mur de Berlin, les conflits se sont multipliés, la pauvreté est augmentée, le conflit social n’a pas disparu. La liberté et la démocratie dans nombreux Pays de la planète restent un mirage. La situation en Syrie est par exemple très grave. Contre les dictatures existe-t-il un droit d’ingérence démocratique de la part de la communauté internationale ?

 

Mario Vargas Llosa. Oui, exactement. Pour une société, la dictature, c’est le mal absolu. Et si la dictature est le mal absolu, alors les démocraties ont l’obligation morale d’aider ceux qui y sont soumis et qui luttent pour leur liberté. Je pense qu’il existe des circonstances dans lesquelles les pays démocratiques peuvent aider au rétablissement, à l’établissement de la démocratie. Dans certains cas, en particulier quand une dictature menace la paix internationale, je trouve cette option possible.

 

Antonio Torrenzano. Vous l’avez vécue au Pérou, dans votre Pays natal.

 

Mario Vargas Llosa. Je l’ai vécu chez moi. Les dictatures ont été la cause des situations catastrophique de tous les pays d’Amérique latine. Les conséquences des dictatures militaires sont toujours les mêmes : un renforcement des prérogatives de l’État, dans le secteur public et une aggravation de la corruption. Les dictatures avaient précipité toute la région dans la pauvreté.

 

Antonio Torrenzano. Quel a-t-il été le résultat de cette période historique en Amérique latine ?

 

Mario Vargas Llosa. La catastrophe qui n’a épargné personne et les réformes qui avaient perdu tout caractère attractif pour l’opinion publique.

 

Antonio Torrenzano. Vous avez beaucoup écrit sur l’Iraq. La construction d’un État démocratique et pacifié reste-t-elle une possibilité lointaine ?

 

Mario Vargas Llosa. C’est une perspective possible, mais pas dans l’immédiat. Même dans le scénario le plus optimiste, la démocratisation du pays passera par une voie très lourde. À l’heure actuelle, des attentats systématiques empêchent le retour à la normalité.

 

Antonio Torrenzano. Vous partagez votre vie entre l’Europe (en vivant entre trois villes Madrid, Londres et Paris) et l’Amérique latine. Qu’est ce que vous pensez du modèle politique de l’Union européenne ?

 

Mario Vargas Llosa. L’Europe me semble être le seul grand projet révolutionnaire de la culture de notre époque. Elle devrait être le contrepoids à ce monde de début de siècle en apportant une concurrence intellectuelle salubre pour la santé de l’humanité. Les citoyens de l’île Lampedusa montrent par exemple au monde entier le vrai visage de l’Europe en soignant et en accueillant des individus immigrés qui joignent de la rive opposée de la mer méditerranéenne. Je crois que le peuple de Lampedusa est un exemple pour toute l’Europe d’aujourd’hui. Cette attitude humaine généreuse, il est celle-là que tout le monde devrait avoir devant le problème pénible de l’émigration. Un projet d’une transcendance extraordinaire. Cette Europe est la dernière utopie réaliste, mais si elle prend du retard elle risque de s’affaiblir.

 

Antonio Torrenzano. Comment jugez-vous le travail journalistique dans la vie d’un écrivain?

 

Mario Vargas Llosa. J’ai commencé à l’Agence France-Presse, il y a très longtemps, au desk espagnol. À présent, j’écris des articles pour le quotidien El País. Pour moi, le journalisme a été fondamental ; il a constitué un complément essentiel à ma vie d’écrivain. Je n’aime pas les écrivains isolés dans leur chambre avec leurs fantômes et leurs rêves. Moi, je suis d’une génération qui a toujours pensé que la littérature ne doit pas divertir, mais améliorer la vie et aiguiser la lucidité des gens.

 

Antonio Torrenzano

 

 

lire également : La Sicile du Guepard. Conversation avec Gioacchino Lanza Tomasi. http://e-south.blog.lemonde.fr/2007/08/21/la-sicile-du-guepardconversation-avec-gioacchino-lanza-tomasi/

 

 

 

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Conversation avec Tzvetan Todorov, essayiste, historien. Sa carrière professionnelle s’est déroulée au CNRS du 1968 au 2005, où il est aujourd’hui directeur de recherche honoraire. Structuraliste au départ, il a beaucoup écrit sur les idéologies du XX siècle. En 2008, son œuvre a été couronnée par le prestigieux prix du Prince des Asturies. Auteur des nombreux essais dont : « L’histoire des idées : théorie du symbole», 1977 ; « Nous et les autres », 1989 ; « Le jardin imparfait », 1998 ; « Éloge de l’individu », 2000 ; « Les aventuriers de l’absolu », 2006; « La peur des barbares », 2008; « La signature humaine », 2009; « Le siècle des totalitarismes », 2010. La conversation a eu lieu à Venise auprès de l’université Cà Foscari au mois de mai 2013 et à Milan pendant le festival La Milanesiana au mois de juillet 2013.

 

Antonio Torrenzano. Antonio Torrenzano. Le monde est en train de vivre de profonds changements. Changements pas seulement financiers et économiques, mais aussi politiques, sociaux, institutionnels et moraux. Est-il urgent de réinventer un nouveau modèle social ? Est-il urgent de renouer les utopies pour redonner du sens à la vie ?

 

Tzvetan Todorov. Pour moi, ce n’est pas exactement une philosophie au sens strict du mot, c’est plutôt un choix de valeurs, une vision du monde. L’être humain peut suivre tout ce qu’on lui dit de faire, mais il peut aussi s’en arracher, s’y opposer. Jean-Jacques Rousseau disait ainsi: “l’homme peut acquiescer ou résister”. Cela est pour moi absolument essentiel.La deuxième caractéristique tout aussi fondamentale est que dans l’optique humaniste, la finalité ultime de nos actes doit être le bien-être des êtres humains eux-mêmes. Enfin, la troisième grande caractéristique est l’universalité, c’est-à-dire que les traits que l’on exige des hommes et qu’on leur propose s’appliquent à tous les êtres humains.

 

Antonio Torrenzano. Vous avez beaucoup écrit et réfléchi sur les grandes tragédies du XXe siècle, quelle est-elle votre pensée en revanche sur notre époque contemporaine?

 

Tzvetan Todorov. La confrontation capitalisme contre le communisme est disparue. Nous avons aujourd’hui d’autres contrastes, mais très différents. Il existe pourtant des mutations dans notre monde et notre actualité, qui ont probablement un impact négatif sur la vie morale de la population. L’invention des ordinateurs et leur mise en réseau influencent en profondeur nos activités de communication, donc les relations entre individus et, par là, nos actes moraux. Il y a un siècle, l’information était rare, le téléphone difficile à obtenir, les nouvelles lentes à nous parvenir ; aujourd’hui, l’information est continue et pléthorique. Chacun de nous est branché en permanence sur plusieurs réseaux et communique avec un grand nombre de personnes. Tout le monde jouit de ces technologies, mais en même temps, il se plaint d’un sentiment de solitude, d’isolement, d’abandon. Triomphe et échec de la communication semblent d’avancer de pair.

 

Antonio Torrenzano. Qu’est ce qu’il s’est passé après la chute du Mur de Berlin ?

 

Tzvetan Todorov. Depuis la chute du Mur de Berlin, qui a déclenché la montée en puissance du néolibéralisme, nous sommes en train d’assister en Europe à un changement de perspective, comme si l’effondrement de l’empire soviétique devait entraîner la déconsidération des valeurs de solidarité, d’égalité, de bien commun, dont ce pays et ses satellites se réclamaient hypocritement. Aujourd’hui, la doctrine néolibérale postule que les intérêts économiques priment sur nos besoins sociaux et que l’être humain soit autosuffisant.

 

Antonio Torrenzano. Ce changement, il me semble néfaste … Les conflits se sont multipliés, la pauvreté est augmentée, le conflit social n’est pas disparu.

 

Tzvetan Todorov. Les conflits aujourd’hui se fondent sur divergences politiques, économiques, sur des rêves de pouvoir plutôt que sur une vision clairvoyante de l’avenir.

 

Antonio Torrenzano. Dans un monde où la satisfaction de l’individu est la seule valeur partagée, y a-t-il encore un espace pour vivre ensemble ?

 

Tzvetan Todorov. La morale n’est pas menacée d’effondrement définitif : elle est inhérente à la conscience humaine. Si la morale disparaissait, c’est que l’espèce elle-même aurait subi une mutation. Les évolutions technologiques exigent une meilleure maîtrise de nos nouvelles capacités, un peu comme on apprend à utiliser une voiture sans mettre sa vie en danger.

 

Antonio Torrenzano. Avec Rolland Barthes, vous avez approfondi la théorie du structuralisme. Pourquoi préférez-vous parler de méthodologie plutôt que de théorie ?

 

Tzvetan Todorov. C’est une “méthode”. La méthode structurale était une chose utile à introduire dans le champ des études littéraires pour apprendre à mieux lire les textes, mais une fois qu’on l’a introduite, cela cesse d’être un sujet de bagarre ou de débat. La méthode structurale est plutôt un instrument dont il faut apprendre à se servir et si on l’utilise c’est très bien,mais ce n’est pas le seul instrument disponible dont j’aime me servir.

 

Antonio Torrenzano

 

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Cet article fait suite à deux essais sur les politiques de jeunesse en Tunisie (1) et au Maroc (2), édités par la Commission européenne en 2009. Le grand malaise et les tensions qui traversaient la jeunesse de ces pays à cette époque avaient été largement évoqués et on parlait déjà d’une jeunesse hésitant entre « rébellion et soumission », formule prémonitoire au regard des événements de 2010 et 2011. Il s’agit ici de définir aujourd’hui, un an après, la place des jeunes dans les États du sud de la Méditerranée, leur place dans les sociétés, en termes de force sociale et politique. Il nous faut aussi insister sur les termes de « société civile» et de « transition démocratique », car nous effectuons trop souvent une transposition hâtive de concepts et d’analyse émanant des États du nord de la Méditerranée et, pour faire court, de l’Occident composé d’États démocratiques qui ont des traditions parlementaires et pluralistes bien différentes des rivages sud et est de la Méditerranée. L’ensemble géographique de l’espace méditerranéen est traversé par des tensions et souvent des incompréhensions entre les sociétés des rives nord et sud, si bien que les évènements qui continuent aujourd’hui de bouleverser l’ordre établi des États arabes sont lus et analysés dans les États du nord à partir de grilles de lecture souvent éloignées des réalités. Il nous semble nécessaire, dans cet article, de revisiter tous ces concepts et d’approcher la complexité de cette jeunesse qui a occupé et qui occupe encore des postes avancés lors des manifestations puis des révoltes, qui surfe sur les réseaux sociaux et qui « met le levain dans la pâte sans en recueillir toujours le pain ».

 

Un enchevêtrement de faits.

Le 17 décembre 2010, le jeune Mohamed Bouazizi s’immole par le feu dans la ville de Sidi Bouzid en Tunisie après la confiscation par la police de sa charrette de légumes. Moins d’un mois plus tard, le 14 janvier 2011, Zine el-Abidine Ben Ali, au pouvoir depuis le 7 novembre 1987, fuit son pays, chassé aux cris de « dégage ! » scandés par la foule des semaines durant. À peine un mois plus tard, le 11 février, c’est au tour du raïs égyptien, Mohammed Hosni Moubarak, de partir, poussé dehors par une mobilisation populaire sans précédent. À la même époque, le Yémen, la Jordanie, le Bahreïn, la Libye, la Syrie, tous ces États sont agités par la même fièvre révolutionnaire. En Algérie, le pouvoir tente d’étouffer les tentatives de soulèvement en achetant le calme par la distribution des pétrodollars et en renforçant la pression militaire. La monarchie marocaine, quant à elle, s’empresse de proposer une réforme anticipée de sa Constitution qui limite les prérogatives politiques du roi sans porter atteinte à ses immenses privilèges économiques. Avant la fin de l’été 2011, la Libye, avec l’intervention de forces de l’OTAN, se libère du joug de Mouammar Kadhafi après de très violents affrontements armés.

 

En mars de la même année, le peuple bahreïni est écrasé par les militaires soutenus par des forces des pétromonarchies affolées par le risque de contagion au sein de leurs États. Quant aux Syriens, ils continuent d’affronter, dans le sang et les larmes, la répression acharnée des troupes de Bashar al-Assad. Nous ne connaissons pas encore l’issue de ce conflit qui prend la forme d’une guerre civile, mais il est sûr que, d’ores et déjà, le régime est discrédité. Nous sommes amenés au constat suivant : en moins de dix mois, la géopolitique des pays du Maghreb, du Mashreq, du Proche-Orient et des États du Golfe est, soit bouleversée, soit altérée par des « révolutions » aussi soudaines qu’inattendues qui cassent l’image d’immobilisme des sociétés arabes, véhiculée souvent par l’Occident et qui les fait « entrer dans l’histoire ».

 

Des sociétés arabes en proie à « une fatigue sociale ».

Face à ce basculement historique dont nous ne connaissons ni ne maîtrisons tous les déterminants, il est bon de rappeler combien ces sociétés arabes étaient en proie à une sorte de « fatigue sociale » en raison des contextes politiques, économiques et sociétaux qui contribuaient à les « anesthésier », voire même à les paralyser. Progressivement s’était mise en place à la tête des États une sorte de « cartellisation » du pouvoir doublée d’un durcissement sécuritaire. Aucune limite dans le temps ne laissait espérer un renouvellement des dirigeants dans ce système plébiscitaire figé. Les groupes qui monopolisaient la coercition violente avaient et ont encore, dans certains d’entre eux, un rôle considérable au sein de la société. « Le phénomène de multiplication des corps armés et de police est une caractéristique commune à de nombreux États autoritaires dont le processus d’institutionnalisation demeure inachevé. Le dédoublement et parfois la démultiplication entre armée et police, forces armées et services de renseignement, armées et milices du régime, forces armées de l’État et forces armées privées, témoignent de la défiance du régime à l’égard de ses agences militaires et sécuritaires ». (Elisabeth Picard, Armée et sécurité au cœur de l’autoritarisme).

 

Nous rappelons encore comme les politiques occidentales antiterroristes post 11 Septembre avaient contribué au renforcement des complexes sécuritaires, renforcement qui s’était effectué aux dépens des engagements des États dans les domaines sociaux, éducatifs et de la santé. Ces sociétés étaient traversées par la peur de la répression sous toutes ses formes. C’est cette peur qui a donné aux jeunes la force de faire « bloc » et d’avancer alors que le pouvoir attendait leur retrait. La priorité sécuritaire dans ces États avait favorisé la diminution de leurs fonctions régaliennes au profit de nombreuses ONG, de confréries, d’organes de la société civile qui se substituaient à l’éclatement de la régulation politique de la société. Est-ce la concentration du pouvoir et le détournement des biens communs au profit de quelques-uns qui ont contribué au fait que cette zone géographique, y compris les États producteurs de pétrole, soit la seule zone de la planète à avoir peu progressé durant les dernières décennies, comme en témoignent les rapports du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) ?

 

Les chiffres sont accablants : un habitant sur cinq vit avec moins de deux dollars par jour. La période actuelle se caractérise par une pauvreté absolue importante et même croissante dans plusieurs États, dont l’Égypte, où elle touche près d’un cinquième de la population, ou le Yémen, avec près de 50 % des habitants classés dans ce registre de pauvreté absolue. Le pourcentage (officiel) des chômeurs frôle les 20 %, 23 % des plus de 15 ans sont analphabètes, il y a plus de 17 % d’illettrés malgré la très forte hausse de l’alphabétisation, sans oublier le taux de mortalité des mères, la sous-représentation des femmes dans les espaces politiques (les parlements ne comptent que 8 % de femmes députées contre une moyenne mondiale de 18 %). Ajoutons, à ces constats la prise en compte d’un contexte démographique difficile pour les politiques publiques de ces États : 65 % des populations a moins de 25 ans, l’âge moyen atteint tout juste 22 ans (contre une moyenne mondiale de 28 ans), malgré une forte et rapide baisse de la fécondité des femmes au Maghreb (de six enfants par femme dans les années 1980, on est passé à un peu plus de deux aujourd’hui). Tous ces éléments modifient en profondeur les rapports intergénérationnels et l’organisation de la société. Ils nous éclairent sur la conflictualité interne qui perdure aujourd’hui à l’intérieur de ces sociétés, conflictualité largement sous-estimée par les Occidentaux mobilisés sur des impératifs sécuritaires, des angoisses autour de l’islam, des intérêts économiques et avec un regard quelque peu condescendant à leur égard. Face à ces constats, on peut affirmer, comme Václav Havel dans son essai politique « Le pouvoir des sans pouvoir », que les individus de ces sociétés, et plus particulièrement les jeunes, étaient en position de « sous-citoyens », ce qui explique que le premier mot scandé lors des manifestations ait été « dignité ».

 

De quelle « société civile » parlons-nous ?

Avant d’évoquer l’organisation de la société civile, il faut plutôt parler, dans un premier temps, d’une forme de dissidence dans l’affirmation de l’individu et de la volonté de maintenir, malgré tout, des liens sociaux dans la vérité et la transparence. « Comparaison n’est pas raison », certes, mais, les propos de Václav Havel dans « Le pouvoir des sans pouvoir» sur le Printemps de Prague résonnent étrangement en écho : « Il est aujourd’hui difficile de rechercher dans quel milieu, quand et par quels sentiers sinueux tel ou tel acte ou position authentique a agi et de quelle manière le virus de la vérité s’est graduellement propagé à travers les tissus de la ˝vie dans le mensonge˝ et a commencé à l’attaquer ; une chose pourtant semble manifeste : ˝la tentative de réforme politique n’a pas été la cause de l’éveil de la société, mais bien sa conséquence finale˝».

 

Ce sont les jeunes, forces vives des États, par opposition aux hommes politiques considérés comme des « professionnels » de la politique, qui descendent dans les rues et sur les places et qui sont l’expression du corps social par opposition au corps politique. Ces jeunes sont en attente d’une vie sociale et économique organisée selon la logique de la société civile, suivant une ligne qui trouverait sa dynamique à l’intérieur d’elle-même plutôt que dans le rôle de l’État. Václav Havel parle de « la vraie vie » par opposition au mensonge et à la corruption ambiante des régimes autoritaires. « Notre révolution est civile, ni violente, ni religieuse » avaient pour slogan les militants de la place Tahrir. C’est selon cette approche de la société civile que nous nous interrogerons sur le rôle des jeunes dans les sociétés lors du printemps arabe.

 

Des jeunes « pluriels », toutes victimes d’un déclassement .

Il nous faut, en premier lieu, envisager la place des jeunes dans les sociétés arabes au moment du déclenchement spontané des évènements. Il serait plus pertinent de parler plutôt de « l’absence de place » pour la jeunesse. « Nous sommes sans être ni avoir » s’exprimait une jeune étudiante tunisienne à la veille des hostilités, lors d’une interview. Ces jeunes de 15 à 24 ans forment près du quart de la population, mais ils sont aujourd’hui moins nombreux que lors des « émeutes de la faim » et de l’apogée de l’islamisme radical à la fin des années 1980. Le démographe Philippe Fargues observait, il y a 25 ans, à la suite de la transition démographique que « les 20-30 ans n’ont jamais représenté et ne représenteront sans doute plus jamais dans la population de 20 ans et plus une proportion aussi forte qu’aujourd’hui ». De fait, dans les pays arabes, l’arrivée la plus massive de jeunes sur le marché du travail fait désormais partie du passé. Il nous faut donc écarter partiellement la thématique de l’explosion démographique comme facteur du printemps arabe et nous tourner vers les éclairages sociaux et économiques.

 

C’est une jeunesse encore beaucoup trop nombreuse par rapport aux capacités d’absorption du marché du travail, raison pour laquelle les taux de chômage de cette tranche d’âge (les 15-24 ans) sont très importants, allant jusqu’à 30 % en Égypte ou 32 % au Maroc, avec de grandes disparités géographiques à l’intérieur des États. En décembre 2010, l’immolation par le feu du jeune Mohamed Bouazizi à Sidi Bouzid, où les deux tiers de la population de la région sont sans emploi, c’est symptomatique du désespoir de la jeunesse de nombreux pays arabes. Que dire aussi de la situation des jeunes diplômés ? Si l’on se réfère de nouveau à la Tunisie, 60 000 diplômés de l’enseignement supérieur arrivent chaque année sur le marché du travail alors que plusieurs dizaines de milliers sont déjà inscrits à l’Agence Nationale de l’Emploi et du Travail Indépendant (l’ANETI). Selon une étude réalisée par Carnegie Moyen-Orient, ces jeunes diplômés sont plus affectés par le chômage que la moyenne des actifs. Alors que l’absence d’emploi formel concerne 13,3 % de la population, les jeunes qualifiés représentent 21,1 % des chômeurs. En Algérie, pays qui vit de sa rente provenant des hydrocarbures, les jeunes diplômés sans emploi sont deux fois plus nombreux que dans d’autres pays ayant le même niveau de revenu par habitant.

 

On peut parler de désespoir de cette jeunesse diplômée qui a nourri des aspirations d’ascension sociale par l’investissement éducatif et qui partage un sentiment de déclassement par rapport aux opportunités offertes sur le marché de l’emploi national. Dans les monarchies du golfe, la jeunesse connaît aussi un déclassement dû en partie au boom immobilier des années 2000 et à la hausse du prix du logement. Il en résulte de fortes tensions intergénérationnelles entre ces jeunes « bloqués » chez leurs parents, faute d’indépendance financière jusqu’à 30 ans et plus et leurs aînés qui ne comprennent pas et supportent mal ces enfants « gâtés » qui restent à leur charge. Cette déception touche majoritairement les classes moyennes, mais les évènements qui ont suivi la mort de Mohamed Bouazizi ont permis la rencontre entre jeunes défavorisés, des villes comme des campagnes, et jeunes intellectuels déclassés majoritairement urbains. On a assisté alors dans les États arabes à l’alliance imprévisible entre les différentes composantes de cette jeunesse « plurielle » qui partageait ce sentiment de déclassement et d’exclusion. Les jeunes de Tunisie, certes, ne sont pas les jeunes du Bahreïn ni les jeunes de Syrie ou du Maroc, mais ils partagent cependant des traits communs très médiatisés sur la Rive-Nord de la Méditerranée avec un accent mis sur le traitement du rôle des jeunes femmes dans le printemps arabe.

 

Qui sont ces jeunes femmes impliquées dans le printemps arabe ?

Les télévisions du monde entier nous ont montré des figures contrastées et emblématiques. Ce sont ces images de jeunes femmes arborant voiles et niqabs noirs, agitant des drapeaux dans une posture conquérante lors de manifestations populaires. Ce sont aussi ces héroïnes prenant la tête de la révolte comme celle figurant dans Le Monde Magazine du 5 février 2011 qui affiche en pleine page la photo d’une jeune femme, seule devant un cordon policier, avec le commentaire suivant « BRAVOURE. Au Caire, le 26 janvier, cette jeune femme exhorte les manifestants à avancer vers un cordon de police ». Ce sont aussi ces jeunes femmes, laïques et fières de l’être, comme Nadia El Fani, témoignant sur les plateaux de télévision. Les premières représentent ce que l’Occident redoute, les secondes l’espoir d’un basculement de cette jeunesse dans les standards de la mondialisation : jeunes blogueuses, symbolisant le combat des femmes contre la dictature et le patriarcat, héroïnes de la défense des droits de l’homme dans le monde arabe. Ces deux postures, bien réelles, restent cependant dans des représentations stéréotypées de l’engagement politique des jeunes femmes dans cette région. Il faut éviter la lecture très réductrice, dans le premier cas, d’un engagement politique féminin, prolongement et ou réaction à la domination masculine et, dans le second, faisant de la jeune femme arabe la seule véritable actrice du printemps arabe et cantonnant les hommes dans le rôle de suiveurs.

 

Aux yeux de l’Occident, elle ne peut être que soumise ou rebelle, posture largement reprise des représentations des jeunes maghrébines en France, rappelons-nous du mouvement « ni putes ni soumises ». En fait, l’engagement politique des femmes dans cette région n’a pas attendu le printemps arabe et il résulte souvent de causes moins héroïques mais, aussi plus profondes, comme la généralisation de la scolarisation des filles, la baisse du taux de fécondité et l’intégration progressive d’une partie de ces jeunes sur le marché du travail salarié. Une minorité grandissante a pris des responsabilités dans le monde associatif ou des engagements politiques par des mandats électifs et des postes importants dans des partis. L’étonnement des Occidentaux face à cette forte présence féminine lors des mouvements protestataires en Tunisie, en Égypte, au Maroc, en Syrie, au Yémen, au Bahreïn résulte surtout de l’ignorance du phénomène de politisation progressif des jeunes femmes arabes et de leur place dans l’espace public aujourd’hui, ignorance doublée d’une certaine complaisance de leurs homologues journalistes occidentales.

 

« On n’imagine guère, en France, rappelle Sonia Dayan-Herzbrun, que dès le début de ce XXe siècle, il ait pu exister un féminisme militant dans ces régions du Proche-Orient qui cherchaient à la fois à se libérer de l’emprise d’un empire ottoman moribond et d’une colonisation européenne aux visages multiples. Dès qu’il est question des femmes de ce que l’on a pris l’habitude d’appeler le monde arabe, les préjugés et les stéréotypes orientalistes s’accumulent». Les débuts du féminisme dans le monde arabe sont plutôt le fait des hommes exprimant un certain « féminisme au masculin » comme l’exprime la sociologue tunisienne Leila Labidi. Ce sont des réformistes musulmans qui plaident pour l’émancipation des femmes dans le cadre de la charia dès les années 1930 et qui ont fortement inspiré le code du statut personnel tunisien proclamé en 1956 qui reste aujourd’hui le plus libéral et le plus égalitariste de tout le monde arabe, même si ce « féminisme d’État » ne satisfait plus pleinement les jeunes femmes qui descendent dans la rue en Tunisie depuis plus d’un an.

 

Aujourd’hui, la complexité de la lecture de la place de la femme dans les sociétés arabes et de son rôle politique a été renforcée par l’instrumentalisation de la question féminine sous les régimes autoritaires du Maghreb et du Mashreq, mais aussi dans les régimes conservateurs d’Arabie saoudite, du Maroc, du Koweït, surtout depuis les attentats du 11 septembre 2001. Tous ces États ont valorisé une sorte de féminisme d’État en faveur des droits des femmes. Ils ont encouragé les ONG féminines travaillant pour la promotion des femmes dans l’espace public et développé un arsenal de mesures qui donnaient une illusion d’avancées démocratiques aux yeux de leurs soutiens occidentaux. L’exemple le plus emblématique est la proclamation de la Moudawana (le code de la famille) décrétée par Mohamed VI en février 2004, sorte de « féminisme islamique d’État » qui déclare l’émancipation des femmes au nom de la lecture libérale des textes religieux (ijtihad) sans remettre en cause le fondement patriarcal de la société. Ce féminisme d’État peut aussi être mis au service de la lutte contre les islamistes déclarés « les ennemis des femmes » alors que le Roi avait flatté quelques années avant « la fibre musulmane » des peuples. Cette instrumentalisation de la cause des femmes par les régimes autoritaires a toujours été contestée par les mouvements féministes. Aujourd’hui, les discours des féministes arabes critiquent un patriarcat non plus pensé comme la domination masculine, mais comme un patriarcat social, politique économique et sociétal qui empêche les hommes comme les femmes d’avancer dans la vie. Nous ne sommes plus vraiment dans un rapport dominant (les hommes) et dominé (les femmes), mais dans un rapport de pouvoir et d’aspiration à la liberté. Les jeunes femmes, comme leurs homologues masculins, veulent s’affranchir de la pression familiale et sociale devenue de plus en plus contraignante avec l’effritement du modèle familial traditionnel, la crise urbaine du logement et leur très grande difficulté à trouver un emploi. On parle même d’un « malthusianisme de la pauvreté » (Montenay, 2009). Cette expression résume la conflictualité générationnelle de tous ces jeunes « bloqués » chez leurs parents et soumis à un célibat prolongé.

 

Qu’en est-il du rapport des jeunes à l’islam dans les États arabes ?

Sur cette question, de nouveau la prudence s’impose ainsi que la prise en compte de la complexité. Nous retrouvons cette même fracture générationnelle dans l’islamisme avec l’opposition des « vieilles barbes blanches » aux « jeunes barbes noires » ainsi qu’aux jeunes imberbes. Si les directions des organisations politiques restent entre les mains d’hommes d’âge mûr, écartant les jeunes et les femmes des responsabilités partisanes, on a pu constater leur méfiance, voire leur retrait des mouvements de contestation « spontanés » qui échappaient à leur contrôle, par opposition aux jeunes de leurs mouvements qui se sont joints aux manifestations contre les régimes, plus en accord avec les slogans et les attentes de leur génération qu’avec leurs aînés.

 

Il est tout à fait possible de généraliser au monde arabe ces constats de Patrick Haenni à propos des querelles intergénérationnelles au sein de la confrérie des Frères musulmans : «Les revendications de la nouvelle génération sont : plus de transparence, moins d’autoritarisme, reconnaissance de la jeunesse, valorisation d’un travail en réseau, aspiration à la démocratie, refus des grands slogans. Ces six points sont tous en contradiction avec le positionnement de leur leadership. Ce que les Frères musulmans n’ont pas compris, en tout cas au départ, c’est que la mobilisation de leurs jeunes était autant une volonté de renversement du régime politique corrompu qu’une remise en cause du fonctionnement de l’institution qui les concerne. Là où ils appellent à la transparence, les Frères sont dans la culture du secret. Là où ils pensent en réseaux, leurs leaders pensent en organisation pyramidale. Là où ils pensent liberté d’action, leurs aînés pensent autorité et hiérarchie. Là où ils pensent démocratie, une partie du leadership ne met pas nécessairement le même contenu dans ce terme ». C’est ce clivage sociopolitique entre les classes d’âge qui constitue l’élément transversal de la jeunesse du printemps arabe. Dans leurs revendications, les jeunes islamistes sont proches des autres jeunes arabes. Comme eux, ils rejettent les méthodes paternalistes et autoritaires, ils dénoncent autant les dictateurs que les dirigeants de leur propre formation. C’est l’expression juvénile de « la disgrâce du chef » selon Michel Camau. Cet élément devrait jouer un rôle majeur lors des transitions post révolutionnaires.

 

Ces jeunes arabes, acteurs de la subversion plus que de la révolution.

Une des caractéristiques communes c’est, pour la grande majorité d’entre eux, l’utilisation de modes d’action pacifiques ou légaux, mais chargés d’un fort potentiel contestataire et d’une grande défiance à l’égard des institutions et du régime en place. L’occupation des places publiques a été un dénominateur commun à toutes les révoltes arabes, au point que ces places sont devenues un acteur politique à part entière, devenant les porte-parole du peuple à elles seules. Autre caractéristique de ces révoltes arabes, c’est le rôle joué par les réseaux sociaux. Pas seulement les réseaux sociaux de la jeunesse éduquée : « Facebook » et « Twitter », car ceux-ci dépendent du taux d’équipement des populations (inférieur à 10 % en Égypte et moindre encore pour les téléphones portables) et des usages très différenciés de ces médias. Ces nouveaux médias se sont superposés à des réseaux plus anciens qui structurent depuis longtemps les sociabilités des pays arabes, malgré les contrôles et les pressions exercés par le pouvoir en place, tels des syndicats comme l’Union générale des travailleurs tunisiens (UGTT), des universités ou des réseaux de solidarité comme la confrérie des Frères musulmans en Égypte, l’un des plus puissants réseaux de solidarité combattus par Moubarak. Une autre approche singulière des révoltes est à relier à des actes de la vie quotidienne, des engagements locaux apparemment sans finalité publique ou politique. Cet ensemble de pratiques, qualifiées « d’infra politiques », dont les jeunes des sociétés arabes étaient porteurs depuis des années, a explosé depuis un an et semble infléchir une forme de sécularisation de l’islamisme, une sorte de « post-islamisme » (Gilles Kepel).

 

Mark Levine a pu identifier les signes de ce « post-islamisme » en observant la musique «Heavy Metal ». Reda Zine, un chanteur marocain du genre, expliquait à Mark Levine « nous jouons du ˝Heavy Metal˝ parce que nos vies sont ˝Heavy Metal˝ », c’est-à-dire oppressantes, en lutte contre la censure, le jugement des autorités et le pouvoir des religieux. Rappelons aussi le rôle des graffs comme cet immense pochoir d’Alaa Abdel Fattah sur les murs d’un hôpital militaire égyptien agrémenté de ce slogan rageur « Vous pouvez nous tuer, mais vous ne nous gouvernerez pas » ou ce rappeur marocain, L7a9d, emprisonné pour avoir réclamé dans ses textes « ses droits tout de suite » et avoir déclaré qu’il préférait « vive le Peuple » à «vive le Roi ».

 

Et aujourd’hui, que reste-t-il ?

Certes, un an après, une partie de cette jeunesse a le sentiment d’avoir été peu ou pas entendue. Le besoin d’un retour à l’ordre s’est exprimé dans les urnes avec l’arrivée au pouvoir des islamistes, mais rien ne sera plus comme avant. Quelques exemples très significatifs viennent appuyer ce constat. Pour la première fois dans l’histoire des universités égyptiennes, les doyens ont été élus par le corps professoral et non plus désignés par leurs présidents comme il était de coutume.

 

La plus grande université sunnite d’Égypte, l’université Al-Azhar, vient d’inscrire les quatre libertés suivantes dans sa charte : liberté d’expression, liberté dans la création artistique, liberté religieuse, liberté dans la recherche. En Lybie, le Conseil national de transition (CNT) a annoncé la modification de la loi électorale qui doit régir l’élection de l’Assemblée constituante. Celle-ci prévoyait un quota de 10 % réservé aux femmes, mais, sous la pression de la société civile, il a été fixé à 50 %. Certes, la voix des jeunes a été très minorée dans les élections, certes la répression est souvent féroce, mais, désormais, rien ne sera plus comme avant et, pour reprendre la phrase de Václav Havel, grâce aux jeunes « le devenir est à nouveau ouvert».

 

Sylvie Floris

 

* Sylvie Floris est enseignante à l’Institut d’études politiques de Paris.

 

Notes.

(1 ) www.salto-youth.net/downloads/4-17-1876/09-EuroMedJeunesse-Etude_TUNISIE_%28FR%29090708.pdf?

(2 ) www.salto-youth.net/downloads/4-17-1875/06-EuroMedJeunesse-Etude_MAROC_%28FR%29090708.pdf?

 

 Bibliographie.

– BasBous, Antoine, «Le tsunami arabe», Paris. Fayard, 2011.

– BassaM, Tayara, «Le printemps arabe décodé:faces cachées des révoltes», Beyrouth. Al Bouraq Éditions, Collection Études, 2011.

– Bechir Ayari, Michaël, Geisser, Vincent, «Renaissances arabes», Ivry-sur-Seine. Éditions de l’atelier, 2011.

– Boussois, Sébastien, «Le Moyen-Orient à l’aube du printemps arabe. Sociétés sous tension», Strasbourg. Éditions du Signe, 2011.

– Camau Michel, «La disgrâce du chef, mobilisations populaires et crise du leadership», revue Mouvements, n° 66, été 2011.

– Haenni Patrick. « Islamistes et révolutionnaires », revue Averroès, n° 4-5, spécial « printemps arabe », 2011.

– Havel, Václav, «Essais politiques», Paris. Éditions du Seuil, 1991.

– Montenay, Yves,« Démographie et politique », pour la séance « Les dividendes de la transition démographique dans le monde arabe, cas général et exceptions. », lors du XXVI Congrès international de la population, Princeton, 2009.

– M’rad, Hatem, « Libéralisme et liberté dans le monde arabo-musulman, de l’autoritarisme à la révolution», Paris, Éditions du Cygne, Mémoires du Sud, 2011.

– Samir, Amin, «Le monde arabe dans la longue durée : le printemps arabe», Paris, Éditions le Temps des Cerises, 2011.