Conversation avec Stefano Zamagni, économiste, professeur à l’université de Bologne, membre de la Pontificale Académie pour les sciences sociales auprès de l’État du Vatican. Auteur des nombreux essais dont La cooperazione, Bologna, editions Il Mulino, 2008; avec l’économiste et prix Nobel Amartya Sen «Markets, money and history. Essays in honor of Sir John Hicks», Cambridge (UK), Cambridge University Press, 2008; «L’economia del bene comune», Roma, Città Nuova, 2007; «Time in Economic Theory», Aldershot, Elgar, 2004. Le dialogue a eu lieu à Reggio Emilia, au mois de septembre 2009, pendant le 1er festival franciscain.
Antonio Torrenzano. Sa sainteté Benoit XVI a affirmé dans sa dernière encyclique «Caritas in veritate» que l’humanité mondialisée a besoin de règles et de valeurs.
Stefano Zamagni. J’espère que le capitalisme occidental ne continuera plus à exclure l’économie solidaire et ses valeurs: c’est-à-dire, ceux de la gratuité et de la charité. Si le capitalisme libéral continue à ignorer ces valeurs, celui-ci sera destiné à imploser. La crise dans laquelle est tombée la planète ou les nombreuses injustices qu’ils serrent les individus du Nord et du Sud du monde, ils soulignent déjà cette faillite. Sa Sainteté Benoit XVI dans sa dernière encyclique indique un modèle précis auquel regarder : l’utilité sociale et le respect de la dignité de chaque individu. Des valeurs très différentes par rapport à la maximisation du profit et à la capacité de rendement à l’intérieur des usines. À ce propos, nous avons déjà des exemples concrets : l’économie sociale, le monde des organisations sans but lucratif, les coopératives. L’activité économique et sociale de ces sujets indique déjà cette direction. Une réalité qu’aujourd’hui en Europe pèse le 10 % du Pib européen et il occupe le 6 % de la main-d’oeuvre.
Antonio Torrenzano. Après l’assemblée générale des Nations Unies, après le sommet de Pittsburgh, la communauté internationale a-t-elle compris l’urgence d’un nouveau système de rapports internationaux ?
Stefano Zamagni. Je crois qu’il y ait encore au moins trois propositions concrètes à développer au-delà de celle-là formulées par les vingt Chefs d’État et de gouvernement à Pittsburgh: ajouter au Conseil de sûreté des Nations Unies un organisme similaire qui s’occupe de problèmes l’eau, de la nourriture et de la santé pour tous les individus. Si nous avions déjà été cet organisme en mesure de fonctionner, nous n’aurions pas eu encore des individus morts pour la faim ou les spéculations financières sur les grains de l’année 2007. La deuxième proposition est celle de créer d’autres deux Agences techniques mondiales pour ce qui concerne les migrations humaines et l’environnement. Dans ces deux domaines, ils servent tutelles, règles, vérifications et sanctions. La troisième et dernière proposition concrète est celle de faire travailler à côté de l’assemblée des Nations Unies une autre assemblée formée par des ONG, des fondations, des institutions de l’économie solidaire. Non pour discuter à l’infini, mais pour décider et pour gouverner les procès urgents avec solutions rapides et définitives.
Antonio Torrenzano. Pour le marché du travail est un moment critique. Où va-t-on ?
Stefano Zamagni. Sa sainteté Benôit XVI s’est rendu compte que la logique de la maximisation du profit est en train de porter la société occidentale à l’affirmation du mythe de la capacité de rendement contre la dignité de l’Homme. L’individu non plus efficace économiquement, il devient marginal. À ce propos, je rappelle un des derniers discours prononcés par Jean Paul II, au mois de novembre 2004, dans lequel Pape Karol Woytila soulignait que : «la logique de la maximisation du profit et la théorie de l’efficacité managériale sont inhumaines autant que celle contre la race, la religion ou la maladie ».
Antonio Torrenzano