ActualitéBlogrollLivresWeblogs

Conversation avec Mario Vargas Llosa, écrivain, prix Nobel 2010, un des éminents représentants de la littérature latino-américaine contemporaine. L’écriture pour Mario Vargas Llosa a toujours été un instrument au service de l’auteur pour ses idéaux et son amour pour l’Amérique latine. Le 7 octobre 2010, il reçoit le prix Nobel de littérature pour «sa cartographie des structures du pouvoir et ses images aiguisées des résistances, révoltes, et défaites des individus». Quand l’auteur obtint le prix Nobel, il afferma qu’il s’agissait d’un hommage à la littérature latino-américaine. L’auteur donne encore à la littérature de nombreuses missions : par exemple la recherche de nouvelles utopies, la recherche d’une réalité différente de laquelle nous vivons. Mais, si la politique est du côté de la raison, l’écriture, elle se place plutôt du côté de la passion. Mario Vargas Llosa est membre de l’Académie royale espagnole. Il a reçu le Prix Cervantes en 1994; le Prix de Jérusalem en 1995; en 2005, le Irving Kristol Award de l’American Enterprise Institute. La bibliographie de Mario Vargas Llosa est très vaste. Nous rappelons ici : « Lettres à un jeune romancier» 2000; « Un demi-siècle avec Borges », L’Herne, coll. « Essais Philosophie », 2004 et Carnets, 2010; « Le langage de la passion. Chroniques de la fin du siècle », 2005; « Dictionnaire amoureux de l’Amérique latine», 2005; « La tentation de l’impossible. Victor Hugo et Les Misérables», 2008; « Le Monde de Juan Carlos Onetti», 2009; «Le rêve du Celte» inspiré par la vie de Roger Casement en 2011; « Visions d’Amérique latine », 2011; « La civilisation du spectacle », 2012. Essayiste, il est membre de l’Académie Royale espagnole. Il est également chroniqueur dans les colonnes du quotidien El País. L’entretien a eu lieu à Santa Caterina Belice (Agrigento, Sicile) où l’écrivain a reçu le prix littéraire Giuseppe Tomasi di Lampedusa près de l’ancien Palazzo Filangeri, aujourd’hui musée de l’écrivain du Guepard au mois d’août 2013.

Antonio Torrenzano. Aujourd’hui vous êtes en Sicile pour recevoir le prix littéraire Giuseppe Tomasi di Lampedusa. Quelles sont les émotions que ce lieu vous raconte ?

 

Mario Vargas Llosa. Cet endroit m’émeut de manière particulière. Giuseppe Tomasi di Lampedusa a été un écrivain au-dehors de son temps comme Borges, Nabokov. Le Guepard a été un des grands romans du 900. Une oeuvre unique qui n’a pas de précédents et il n’aura jamais d’héritiers. Le Guepard reste encore une oeuvre très vive, puissante. Encore plus que d’autres oeuvres d’écrivains de l’avant-garde de cette époque.

 

Antonio Torrenzano. Quelle est-elle la différence entre la génération d’écrivains comme vous, Gabriel Garcia Marquez, Isabelle Allende et des auteurs de la génération précédente de l’Amérique Latine ?

 

Mario Vargas Llosa. Ma génération en Amérique latine a accordé une grande importance à la forme, à l’aspect technique du roman. En revanche, la génération précédente a considéré comme importants les thèmes historiques en négligeant souvent les aspects purement techniques de l’écriture, de la perspective, de la langue. Pour tous ces auteurs, les aspects formels du texte étaient secondaires, mais ceci a complètement changé avec notre génération.

 

Antonio Torrenzano. Votre roman « Le rêve du Celte » inspiré à la vie de Roger Casement, il raconte d’un patriote irlandais qui a consacré sa vie aux idéaux de justice et liberté jusqu’à la mort. En lisant votre roman, j’ai plusieurs fois comparé la vie de Roger Casement à celle de Giovanni Falcone, le magistrat sicilien tué par la mafia. Un individu qui s’est opposé pour toute sa vie au cancer de la mafia et de l’illégalité. Je crois que Giovanni Falcone autant que Roger Casement, il puisse être le personnage d’un roman historique.

 

Mario Vargas Llosa. Oui, sûrement. La vie de Giovanni Falcone est une histoire humaine merveilleuse qui permet de pénétrer au fond dans le phénomène de la mafia qui a marqué notre temps.

 

Antonio Torrenzano. Jean Baudrillard affirmait par ses écrits que la réalité et la pensée ont disparu dans les écrans. Vous avez beaucoup écrit et réfléchi sur les grandes tragédies du XXe siècle, quelle est-elle votre pensée sur notre époque contemporaine? Cette nouvelle époque peut-elle générer d’individus moins critiques ?

 

Mario Vargas Llosa. Je pense que toute la littérature, la philosophie, la poésie demeurent fondamentales pour la préservation de la liberté et de la citoyenneté. L’école même devrait éduquer à ces principes. Ce n’est malheureusement plus le cas. Pourtant, il faudrait préserver cette curiosité et cet intérêt pour la culture écrite, littéraire, philosophique dans les nouvelles générations, sinon un appauvrissement intellectuel énorme s’ensuivra. Je considère que le pessimisme n’a pas de sens. Toute la littérature nous aide à comprendre mieux notre langue, à penser de manière cohérente, juste, efficace. La littérature abat les frontières au-delà des différences. Les frontières, de cette manière, elles viennent cassées et nous allons au-delà de la langue.

 

Antonio Torrenzano. Antonio Gramsci, il nous rappelle qu’une crise se produit au moment où le vieux monde tarde à disparaitre, et le Nouveau Monde tarde à naitre. Et dans cette période de clair-obscur, il affirmait, des monstres peuvent apparaitre.

 

Mario Vargas Llosa. Le monde dans lequel nous vivons, il est beaucoup plus médiocre de celui-là que nous réussissons à imaginer dans les oeuvres littéraires. L’esprit critique est le meilleur instrument du progrès. Quand nous lisons un roman, nous sommes en train de travailler pour la liberté et pour la fraternité universelle. Comme disait Albert Camus, on peut être pessimiste dans le domaine de la métaphysique, mais pas du point de vue historique, car nous sommes responsables de nos actes et, par conséquent, nous pouvons peser sur la marche du monde. Je crois que tout dépend encore de la politique. Le monde est encore plein de bibliothèques, mais une nouvelle ère culturelle est en train de commencer. Lire toujours des livres, il signifie libérer notre cerveau de l’esclavage des stéréotypes, contribuer à la liberté, augmenter notre esprit critique et apprendre une fraternité universelle.

Antonio Torrenzano. Après la chute du Mur de Berlin, les conflits se sont multipliés, la pauvreté est augmentée, le conflit social n’a pas disparu. La liberté et la démocratie dans nombreux Pays de la planète restent un mirage. La situation en Syrie est par exemple très grave. Contre les dictatures existe-t-il un droit d’ingérence démocratique de la part de la communauté internationale ?

 

Mario Vargas Llosa. Oui, exactement. Pour une société, la dictature, c’est le mal absolu. Et si la dictature est le mal absolu, alors les démocraties ont l’obligation morale d’aider ceux qui y sont soumis et qui luttent pour leur liberté. Je pense qu’il existe des circonstances dans lesquelles les pays démocratiques peuvent aider au rétablissement, à l’établissement de la démocratie. Dans certains cas, en particulier quand une dictature menace la paix internationale, je trouve cette option possible.

 

Antonio Torrenzano. Vous l’avez vécue au Pérou, dans votre Pays natal.

 

Mario Vargas Llosa. Je l’ai vécu chez moi. Les dictatures ont été la cause des situations catastrophique de tous les pays d’Amérique latine. Les conséquences des dictatures militaires sont toujours les mêmes : un renforcement des prérogatives de l’État, dans le secteur public et une aggravation de la corruption. Les dictatures avaient précipité toute la région dans la pauvreté.

 

Antonio Torrenzano. Quel a-t-il été le résultat de cette période historique en Amérique latine ?

 

Mario Vargas Llosa. La catastrophe qui n’a épargné personne et les réformes qui avaient perdu tout caractère attractif pour l’opinion publique.

 

Antonio Torrenzano. Vous avez beaucoup écrit sur l’Iraq. La construction d’un État démocratique et pacifié reste-t-elle une possibilité lointaine ?

 

Mario Vargas Llosa. C’est une perspective possible, mais pas dans l’immédiat. Même dans le scénario le plus optimiste, la démocratisation du pays passera par une voie très lourde. À l’heure actuelle, des attentats systématiques empêchent le retour à la normalité.

 

Antonio Torrenzano. Vous partagez votre vie entre l’Europe (en vivant entre trois villes Madrid, Londres et Paris) et l’Amérique latine. Qu’est ce que vous pensez du modèle politique de l’Union européenne ?

 

Mario Vargas Llosa. L’Europe me semble être le seul grand projet révolutionnaire de la culture de notre époque. Elle devrait être le contrepoids à ce monde de début de siècle en apportant une concurrence intellectuelle salubre pour la santé de l’humanité. Les citoyens de l’île Lampedusa montrent par exemple au monde entier le vrai visage de l’Europe en soignant et en accueillant des individus immigrés qui joignent de la rive opposée de la mer méditerranéenne. Je crois que le peuple de Lampedusa est un exemple pour toute l’Europe d’aujourd’hui. Cette attitude humaine généreuse, il est celle-là que tout le monde devrait avoir devant le problème pénible de l’émigration. Un projet d’une transcendance extraordinaire. Cette Europe est la dernière utopie réaliste, mais si elle prend du retard elle risque de s’affaiblir.

 

Antonio Torrenzano. Comment jugez-vous le travail journalistique dans la vie d’un écrivain?

 

Mario Vargas Llosa. J’ai commencé à l’Agence France-Presse, il y a très longtemps, au desk espagnol. À présent, j’écris des articles pour le quotidien El País. Pour moi, le journalisme a été fondamental ; il a constitué un complément essentiel à ma vie d’écrivain. Je n’aime pas les écrivains isolés dans leur chambre avec leurs fantômes et leurs rêves. Moi, je suis d’une génération qui a toujours pensé que la littérature ne doit pas divertir, mais améliorer la vie et aiguiser la lucidité des gens.

 

Antonio Torrenzano

 

 

lire également : La Sicile du Guepard. Conversation avec Gioacchino Lanza Tomasi. http://e-south.blog.lemonde.fr/2007/08/21/la-sicile-du-guepardconversation-avec-gioacchino-lanza-tomasi/

 

 

 

ActualitéBlogrollLivresPolitiqueWeb/TechWeblogs

Conversation avec Tzvetan Todorov, essayiste, historien. Sa carrière professionnelle s’est déroulée au CNRS du 1968 au 2005, où il est aujourd’hui directeur de recherche honoraire. Structuraliste au départ, il a beaucoup écrit sur les idéologies du XX siècle. En 2008, son œuvre a été couronnée par le prestigieux prix du Prince des Asturies. Auteur des nombreux essais dont : « L’histoire des idées : théorie du symbole», 1977 ; « Nous et les autres », 1989 ; « Le jardin imparfait », 1998 ; « Éloge de l’individu », 2000 ; « Les aventuriers de l’absolu », 2006; « La peur des barbares », 2008; « La signature humaine », 2009; « Le siècle des totalitarismes », 2010. La conversation a eu lieu à Venise auprès de l’université Cà Foscari au mois de mai 2013 et à Milan pendant le festival La Milanesiana au mois de juillet 2013.

 

Antonio Torrenzano. Antonio Torrenzano. Le monde est en train de vivre de profonds changements. Changements pas seulement financiers et économiques, mais aussi politiques, sociaux, institutionnels et moraux. Est-il urgent de réinventer un nouveau modèle social ? Est-il urgent de renouer les utopies pour redonner du sens à la vie ?

 

Tzvetan Todorov. Pour moi, ce n’est pas exactement une philosophie au sens strict du mot, c’est plutôt un choix de valeurs, une vision du monde. L’être humain peut suivre tout ce qu’on lui dit de faire, mais il peut aussi s’en arracher, s’y opposer. Jean-Jacques Rousseau disait ainsi: “l’homme peut acquiescer ou résister”. Cela est pour moi absolument essentiel.La deuxième caractéristique tout aussi fondamentale est que dans l’optique humaniste, la finalité ultime de nos actes doit être le bien-être des êtres humains eux-mêmes. Enfin, la troisième grande caractéristique est l’universalité, c’est-à-dire que les traits que l’on exige des hommes et qu’on leur propose s’appliquent à tous les êtres humains.

 

Antonio Torrenzano. Vous avez beaucoup écrit et réfléchi sur les grandes tragédies du XXe siècle, quelle est-elle votre pensée en revanche sur notre époque contemporaine?

 

Tzvetan Todorov. La confrontation capitalisme contre le communisme est disparue. Nous avons aujourd’hui d’autres contrastes, mais très différents. Il existe pourtant des mutations dans notre monde et notre actualité, qui ont probablement un impact négatif sur la vie morale de la population. L’invention des ordinateurs et leur mise en réseau influencent en profondeur nos activités de communication, donc les relations entre individus et, par là, nos actes moraux. Il y a un siècle, l’information était rare, le téléphone difficile à obtenir, les nouvelles lentes à nous parvenir ; aujourd’hui, l’information est continue et pléthorique. Chacun de nous est branché en permanence sur plusieurs réseaux et communique avec un grand nombre de personnes. Tout le monde jouit de ces technologies, mais en même temps, il se plaint d’un sentiment de solitude, d’isolement, d’abandon. Triomphe et échec de la communication semblent d’avancer de pair.

 

Antonio Torrenzano. Qu’est ce qu’il s’est passé après la chute du Mur de Berlin ?

 

Tzvetan Todorov. Depuis la chute du Mur de Berlin, qui a déclenché la montée en puissance du néolibéralisme, nous sommes en train d’assister en Europe à un changement de perspective, comme si l’effondrement de l’empire soviétique devait entraîner la déconsidération des valeurs de solidarité, d’égalité, de bien commun, dont ce pays et ses satellites se réclamaient hypocritement. Aujourd’hui, la doctrine néolibérale postule que les intérêts économiques priment sur nos besoins sociaux et que l’être humain soit autosuffisant.

 

Antonio Torrenzano. Ce changement, il me semble néfaste … Les conflits se sont multipliés, la pauvreté est augmentée, le conflit social n’est pas disparu.

 

Tzvetan Todorov. Les conflits aujourd’hui se fondent sur divergences politiques, économiques, sur des rêves de pouvoir plutôt que sur une vision clairvoyante de l’avenir.

 

Antonio Torrenzano. Dans un monde où la satisfaction de l’individu est la seule valeur partagée, y a-t-il encore un espace pour vivre ensemble ?

 

Tzvetan Todorov. La morale n’est pas menacée d’effondrement définitif : elle est inhérente à la conscience humaine. Si la morale disparaissait, c’est que l’espèce elle-même aurait subi une mutation. Les évolutions technologiques exigent une meilleure maîtrise de nos nouvelles capacités, un peu comme on apprend à utiliser une voiture sans mettre sa vie en danger.

 

Antonio Torrenzano. Avec Rolland Barthes, vous avez approfondi la théorie du structuralisme. Pourquoi préférez-vous parler de méthodologie plutôt que de théorie ?

 

Tzvetan Todorov. C’est une “méthode”. La méthode structurale était une chose utile à introduire dans le champ des études littéraires pour apprendre à mieux lire les textes, mais une fois qu’on l’a introduite, cela cesse d’être un sujet de bagarre ou de débat. La méthode structurale est plutôt un instrument dont il faut apprendre à se servir et si on l’utilise c’est très bien,mais ce n’est pas le seul instrument disponible dont j’aime me servir.

 

Antonio Torrenzano

 

ActualitéLivres

giuseppe_tomasi_di_lampedusa.1187660052.JPG

Giacchino Lanza Tomasi, est le fils adoptif de Giuseppe Tomasi di Lampedusa, musicien,surintendant du Théatre San Carlo de Naples, directeur artistique pour la section musique classique du Festival international de Taormina Arte, ancien directeur de l’Institut culturel de langue italienne à New York auprès de l’ambassade d’Italie aux Nations Unies. La conversation qui a eu lieu à Taormine au mois d’aout, le dialogue cherche de faire le point sur l’écrivain Giuseppe Tomasi di Lampedusa à cinquante ans de sa mort.

 

Antonio Torrenzano.La nouvelle édition italienne du Guépard de Giuseppe Tomasi de Lampedusa est précédé par votre nouvelle introduction qui résume les complexes adversités de l’édition du roman. Dans la première partie de la préface,vous évoquez-le tourmenté parcours du livre avec les deux moments clé:le refus de la publication d’Elio Vittorini par la maison d’édition Mondadori et les éditions Einaudi et la sortie posthume en 1958 chez la maison Feltrinelli.Mais vous introduisez aussi une série de matériels utiles à la compréhension du personnage Giuseppe Tomasi de Lampedusa: comme les notes personnelles du prince, vergés sur son carnet ou les lettres à ses amis.

 

Giacchino Lanza Tomasi. Giuseppe Tomasi di Lampedusa commence à écrire son roman après le mois juin de 1955 et il termine la première rédaction à la fin de 1956.Le roman ne naissait pas au hasard, mais il était le fruit d’une expérience autobiographique de mon père, durée toute la vie.Le projet initial était raconter la journée d’un prince sicilien en 1860.Comme il affirmait:“les 24 heures d’un Prince sicilien vécu avant le jour du débarquement de Garibaldi”. Plus tard il se rendue conte que cette organisation du livre était limitative et il a décidée de raconter une période historique plus longue depuis 1860 au 1885 avec la mort du prince. Puis avec la mort réelle de son arrière-grand-père arrivée en 1910. Tomasi di Lampedusa présenta le premier chapitre au mois de mars du 1956 à son cousin Lucio Piccolo et d’autres amis. Les autres chapitres furent terminés l’an suivant dans le mois de mars 1957. La rédaction du manuscrit fut fait sur de grands cahiers formés protocole.Farncesco Orlando, étudiant et ami de Tomasi di Lampedusa,sous dictée, il tapa à la machine la première rédaction en quatre copies qu’il envoya à l’édition Mondadori et Einaudi. Dans une lettre à Guido Laiolo du 7 juin 1956, l’écrivain communique que:“le roman est composé par cinq longs chapitres,trois épisodes ils se déroulent en 1860,le quatrième en 1883,le dernier et l’épilogue en 1910, où il montre la désagrégation progressive de l’aristocratie.Le protagoniste, c’est moi-même et le personnage de Tancredi est mon fils adoptif Gioacchino”. Dans une lettre suivante toujours à Guido Laiolo, du 2 janvier 1957, l’écrivain affirme:ce n’est pas un roman historique.Le protagoniste Don Fabrizio exprimecomplètement mes idées.Le Guépard est l’aristocratie vue de l’intérieur sans complaisances, mais aussi sans intentions narratives comme De Roberto”.Cependant, il y avait un sixième chapitre, resté pas achevé,titré Le Canzoniere de la Maison Salina. J’ai retrouvé ce chapitre inachevé à la maison de Giuseppe Bianchieri, petit-fils du prince et frère de l’ambassadeur Boris Bianchieri à Rome. Le chapitre était conservé dans une enveloppe avec l’inscription: “matérielle autour du Guépard”. Le chapitre prévoyait 17 sonnets, mais Giuseppe Tomasi di Lampedusa, avant sa mort, avait écrit seulement deux sonnets, une ode et une introduction.

 

A.T. Est-ce que comment vous décririez votre père adoptif? Francesco Orlando décrit Giuseppe Tomasi di Lampedusa comme un intellectuel qui converse dans une manière claire et concrète.Un esprit pénétrant et charmant pour ses interlocuteurs, intellectuel subtil à résoudre les petits embarras dans tous les rapports humains. Ils mélangeaient en mesure différente savoirs raffinés,désenchantement sénile, pessimisme aristocratique et formation positiviste.

 

Giacchino Lanza Tomasi. Un homme très cultivé que pour toute sa vie avait lu et voyagé en Europe. J’affirmerais sicilien dans le plus profond de son coeur,européen dans le plus profond de son esprit. Il parlait anglais,français et alemand.Il connaissait l’espagnol,lisait le russe.L’écrivain avait un esprit laïque, mais profondément intéressé aux sujets religieux.Une grande ampleur de vision historique unie à une perception aiguë de la réalité sociale et politique de l’Italie de cette époque-là et d’aujourd’hui. Un sens délicieux de l’humour. Plusieurs critiques ont affirmé et considéré Tomasi di Lampedusa un écrivain conservateur, mais lui il n’était pas comme ça.Il étudiait Marx,Croce,Gramsci, lisait Lenin et il croyait dans la Révolution française.Célébré comme écrivain de l’aristocratie, il avait toujours considéré la décapitation de Louis XVI :”la meilleure tête détachée de l’histoire.” Il était convaincu que l’histoire dût, de temps en temps, se remuer avec de formidables secousses.Je crois que Giuseppe Tomasi de Lampedusa dans ces écrits a toujours été au-dessus de l’histoire. L’histoire pour l’écrivain était un éternel s’écouler, toujours immuable où le pouvoir est toujours le meme: on change les noms, mais ne pas les manières. Même si la morale de changer pour ne pas changer,il était considérée par Tomasi di Lampedusa dégoûtante. Dans l’intimité, il était taciturne et réservé, il tendait à rester plus avec les choses qui avec les gens, c’était certainement un homme de secrets.Sa journée commençait très bientôt au matin.Il sortait de la maison, achetait le Corriere della Sera et le Giornale di Sicilia qui lisait au café en travaillant.Très intéressé à la politique internationale, il s’amusait à marquer les fautes de la pièce quotidienne. Par la littérature et par la politique, il tirait une leçon morale:comme on agit.La télévision ne lui plaisait pas.Je rappelle que quand une gigantesque télévision apparut dans la maison de son cher cousin Casimiro Piccolo, il décréta en disant:”avec cette fanfreluche on ne pourra converser plus jamais”. Il méprisait les personnes sans curiosité en nous poussant à regarder toujours ailleurs.

 

A.T. Est-ce que le personnage de Tancredi dans le roman a été inspiré à votre personne?

 

Giacchino Lanza Tomasi. Oui, le personnage de Tancredi c’est moi physiquement. Tomasi de Lampedusa pensait à moi quand il écrivait Tancredi. La partie du roman avec Tancredi qui poursuit Angélica dans les couloirs de Donnafugata fut inspirée à moi et à ma fiancée de cette époque là, M.lle Mirella Radice.En le 1953,Giuseppe Tomasi de Lampedusa pense faire quelque chose pour animer Palerme. Il est un homme de culture très haute et il a lu presque tout pour l’epoque.Et alors il prend à fréquenter un groupe de jeunes connus chez le baron Bebbuzzo Sgadari di Lo Monaco. Bebbuzzo était une personne originale d’aristocrate. Dans sa maison ils venaient reçus beaucoup d’intellectuels:Bacchelli, Berenson, Calvino. Auprès de l’ancienne maison Lo Monaco,Tomasi di Lampedusa connaît Francesco Orlando,Francesco Agnello, Antonio Pasqualino, moi-même et ma fiancée de l’époque Mirella Radice.À ce groupe de garçons et jeunes filles, Tomasi di Lampedusa commence à donner des leçons de littérature anglaise et littérature française.Les rencontres se déroulaient trois fois par semaine, près de la maison du Prince, en rue Butera à Palerme, à 18.00 heures. Le cours était tourné principalement à Francesco Orlando, alors jeune étudiant universitaire de 19 ans, inscrit à la deuxième année de la faculté de droit. Les autres garçons participaient occasionnellement, trois ou quatre fois par mois. Notre groupe était formé par dix personnes et ce groupe devint le nouveau point de repère du Prince di Lampedusa. Francesco Orlando deviendra son disciple, je serai adopté successivement. Les leçons de Tomasi de Lampedusa sont basées sur une expérience extraordinaire des textes. Il nous rappelait souvent:”ce que vous entendrez,ce n’est pas que la somme de mes souvenirs et de mes impressions de trente ans de lectures désordonnées passée à travers mon cerveau et marquée dans mon mémoire.Vous avez peu à espérer”. Les rencontres avec Tomasi di Lampedusa nous poussèrent à regarder ailleurs. Ailleurs comme le même affirmait avec sa métaphore: “un seau plein d’eau de mer n’est pas la mer. Pour connaître la mer il faut la sonder, la naviguer et en faillant faire naufrage. Mais tout cela sera réalisé par vous… j’espère seulement être une flèche indicatrice.”

 

Antonio Torrenzano