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Après six ans et demi de guerre, la Syrie est en train de payer «un lourd tribut» économique et social a déclaré le Secrétaire général adjoint des Nations Unies aux affaires humanitaires, Mark Lowcock, la semaine passée à Damas. «J’ai vu cette semaine le bilan colossal des hostilités», a déclaré Mark Lowcock, dans une déclaration aux médias au troisième jour de sa visite en Syrie.

La guerre civile et révolutionnaire qui déchire la Syrie depuis 2011 s’est cristallisée dans un espace de destructions massives et de fronts multiples à l’évolution aléatoire. Le pays urbain (75 % de la population en 2011) n’est plus qu’un champ de ruines, les 7 millions de réfugiés répertoriés s’entassent dans des camps à l’intérieur (1,2 million dans la banlieue de Damas) et à l’extérieur du pays (Liban, Turquie, Jordanie). Les capacités industrielles sont presque entièrement détruites. Se projeter dans un avenir, même à court terme est difficile. Les rounds de négociations ont, jusqu’à ce jour, tourné court. Les différentes parties prenantes restent figées sur leurs positions.

Un bilan économique désolant.

Le produit intérieur brut (PIB) de la Syrie est inférieur à la moitié de ce qu’il était avant la guerre, et le remplacement des infrastructures et des logements détruits coûtera des centaines de milliards de dollars. En moins de six années, l’économie syrienne s’est transformée en une économie de guerre et de pénurie. Une agriculture de subsistance existe seulement dans les régions les moins touchées par la guerre. L’agriculture syrienne, traditionnellement exportatrice, s’est transformée en agriculture de subsistance. « L’industrie du phosphate, branche dans laquelle la Syrie détenait le 10e rang mondial, s’est effondrée. Évaluée à plus de 2 millions de tonnes annuelles en 2011, au 1er semestre 2014, selon la Compagnie générale des phosphates et des mines, la production totale s’était élevée à 493 822 tonnes. Les ventes n’avaient rapporté que 30 millions de dollars, dont 28 millions à l’exportation et le reste pour la fabrication locale de fertilisants».1

La Syrie urbaine et commerçante est détruite en dehors de Damas. Le secteur industriel lourd, essentiellement situé dans les localités urbaines de combat n’existe plus. Les usines textiles se résument à présent à quelques manufactures dans les régions contrôlées par le régime. La ressource touristique qui représentait 2,3 milliards de dollars en 2010 (c’est-à-dire avant le conflit) a disparu. Seules les zones portuaires fonctionnent, car elles alimentent le pays de Bachar Al-Assad en produits d’importation venus de Russie ou d’Iran. L’effort militaire russe a donné un élan significatif à l’espace portuaire, mais il est principalement opéré par les Russes eux-mêmes.2

Une situation sociale désastreuse.

Un Au plan social, en ce qui concerne la santé, sur les 780 établissements recensés dans les six principales villes, environ un tiers a été endommagé. Plus grave encore, l’essentiel des personnels médicaux et hospitaliers, souvent ciblé directement par les actions militaires entre l’armée de Damas et l’opposition syrienne dans les zones de guerre, a fui le pays.3 En matière d’éducation, 1 417 établissements allant de la crèche à l’université ont été endommagés dans les combats, soit 14,8 % d’entre eux. Alep et Deraa ont été les villes les plus touchées. Deux millions d’enfants sont sortis du système scolaire et 50 000 enseignants sont sans emplois.4

Enfin, comme dans toute économie de guerre, les commerces illicites, le marché clandestin et la corruption représentent les différentes formes d’une activité parallèle qui enrichit une minorité de la population alors que l’autre vit dans la pénurie. C’est pourquoi la domination des zones transfrontalières (par exemple les frontières avec le Liban et celle avec la Turquie) est un enjeu majeur pour tous les acteurs sur le terrain de guerre qui se disputent sa surveillance.

Antonio Torrenzano

1 Jean-Claude Cousseran, Jean-françois Daguzan, Agnès Levallois, Manon-Nour Tannous, La ”Syrie utile” : éléments pour des solutions de sortie de crise, Paris, Observatoire du monde arabo-musulman et du Sahel, Fondation pour la recherche stratégique, juillet, 2016, pp.15-16. URL:https://www.frstrategie.org/web/documents/programmes/observatoire-du-monde-arabo-musulman-et-du-sahel/publications/4.pdf

2 Jean-Claude Cousseran, Jean-françois Daguzan, Agnès Levallois, Manon-Nour Tannous, Ibidem, pp. 17-19.

3 Shanta Devarajan, Lili Mottaghi, Quy-Toan Do, Lin Abde, Mohamed Jelil, Syria : Reconstruction for Peace, in Middle East and North Africa Economic Monitor, avril 2016, Washington DC, World Bank press, 2016, pp. 22-24.

4 Source statistique UNICEF Nations Unies, au mois de novembre 2017.

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La situation humanitaire en Syrie reste extrêmement difficile. Ursula Mueller, sous-secrétaire générale aux affaires humanitaires del’ONU, en s’exprimant par vidéoconférence depuis les bureaux des Nations Unies à Amman, a noté au Conseil de sécurité que la situation humanitaire demeure très problématique dans certains endroits.

La sous-secrétaire générale a cité par exemple les zones assiégées de la Ghouta orientale où, malgré l’annonce d’un cessez-le-feu le 22 juillet, les frappes aériennes et tirs de mortiers continuent de faire de nombreuses victimes civiles, ou encore le nord-ouest du pays, où les combats entre groupes armés non-étatiques et terroristes font rage. La région du Ghouta orientale constitue l’une des zones de désescalade désignées à la suite de l’accord du mai 2017 entre parrains du régime et des insurgés visant à parvenir à un cessez-le-feu durable en Syrie.  Après l’arrêt des combats dans certains lieux de la Ghouta orientale, la Russie avait livré plus de 10.000 tonnes d’aide humanitaire. Mais selon les Nations Unies, l’aide reste de manière générale insuffisante dans ces lieux, assiégés en partie depuis 2013 et totalement depuis 2016. Même, la situation à la frontière entre la Syrie et la Jordanie qui s’est dégradée la semaine dernière.

L’accès des organisations humanitaires à certaines zones assiégées s’est amélioré par rapport à l’année dernière. Il est cependant toujours lourdement limité. En ce qui concerne le gouvernorat de Raqqa, l’ONU y a recensé 30.000 nouvelles personnes déplacées depuis le 1er juillet du fait des opérations contre Daech, ce qui porte le nombre total de déplacés dans cette zone à environ 200.000 depuis le 1er avril. Dans la ville de Raqqa, où Daech continue d’utiliser des civils comme boucliers humains, la situation sanitaire devient jour après jour très préoccupante.

Selon le nouveau rapport de la FAO et du PAM, plus de 6,9 millions de Syriens sont toujours en situation d’insécurité alimentaire tandis que 5,6 millions de personnes devraient vraisemblablement se retrouver en situation d’insécurité alimentaire si elles ne disposent pas d’une aide constante chaque mois.

Antonio Torrenzano

ActualitéBlogrollPolitiqueWeblogs

valerie_amos_council_syria_new_york_imageLa responsable des opérations humanitaires de l’ONU Valerie Amos a estimé jeudi que l’évacuation de la ville de Homs en Syrie ne procède pas de manière suffisante. Elle a demandé au Conseil de sécurité de donner aux sujets engagés dans les efforts humanitaires sur le terrain. « Il faut que nous ayons les moyens de faire notre travail – a martelé Valerie Amos – sur le front humanitaire» en jugeant inacceptable la détérioration de la situation sur le terrain.

Elle a également indiqué à la presse que l’ONU avait des « assurances verbales » des belligérants, mais pas une confirmation écrite sur la continuation du cessez-le-feu à Homs. «Sans assurances écrites, nous ne pouvons pas continuer», a-t-elle ajouté. Valerie Amos a déclaré « d’être non seulement pessimiste, mais très frustrée ». Elle a encore ajouté d’avoir averti le Conseil de sécurité que «les progrès sont extrêmement limités et ils sont douloureusement lents » pour porter des aides aux civils. L’évacuation de 1400 civils de Homs est sûrement «un succès vu les circonstances extrêmement difficiles», mais en Syrie 250’000 personnes restent bloquées par les combats sans aucun accès aux secours, a-t-elle souligné.

Valerie Amos a dit d’avoir demandé aux 15 membres du Conseil de sécurité «d’user leur influence sur les parties en conflit pour qu’ils respectent des pauses humanitaires, ils facilitent la fourniture d’aide et ils évitent à nos équipes d’être prises pour cibles quand elles livrent cette aide. La guerre, elle-même, a des règles», a-t-elle rappelé.

Antonio Torrenzano